Peste Noire, c'est le meilleur de la France d'après ce qu'elle fait de pire: nos beaufs, nos alcoolos, nos cyrrhosés et nos tristes sires, Famine les met dans un immense pressoir et nous en distille un savoureux jus de chaussettes, une noble piquette que l'on déguste sur une nappe à carreaux dans une cuisine miteuse et qui nous fait croire à un banquet à Versailles, un coup de pied au cul mais qu'on en red'mande, une fourchette sur une assiette en porcelaine qui fait jouir nos oreilles. C'est ça le Black de Peste Noire: Il nous fait voir, sentir, toucher, entendre, goûter la terre de France, maculée de sang, le chant des oiseaux par-dessus les batailles, les tripes fumantes déversées d'abdomens béants sur la terre boueuse, la marche des soldats arrivants au front, les blessés et les estropiés, et même les morts, qui chantent leur victoire et leur défaite, marchant au rythme de la batterie, guidés par les guitares, poussés par la basse et dirigés par le chant. Peste Noire, c'est avoir réussi à faire du Black plus vrai que true, faire voir le beau en exhibant, pis en créant le laid.
Ce noble album est un fier, nostalgique et ô combien savoureux memorandum de notre pays, son patrimoine, son histoire et sa culture, éloge de sa gloire passé, le tout dans un style qui pourrait être à la musique ce que celui de Louis-Ferdinand Céline est à la littérature. Cet album nous fait voir la lumière dans, ou plutôt par les ténèbres de notre histoire. Cet album est la voix de nos ancêtres, de notre héritage, et il fait voyager. Voyager dans le temps.