Excellente surprise que cet Halloween made in Rob Zombie ! Après plus de 25 ans de suites toutes plus ridicules les unes que les autres, le réalisateur redonne enfin sa dignité à Michael Myers dans une relecture aussi radicale que respectueuse du film culte de John Carpenter.
La grande force du film réside dans son refus de singer l’original, admettant d’emblée qu’il ne pourra jamais l’égaler. Plutôt que d’imiter Carpenter, Rob Zombie choisit d’en prendre le contrepied tout en lui rendant hommage. Il réintroduit notamment un thème majeur du film de 1978 : le rapport trouble de Michael à la sexualité. Chez Carpenter, le tueur semble mû par une forme de puritanisme extrême, comme s’il punissait ceux qui transgressent une morale implicite. Dans la version de 2007, l’origine du mal est bien plus explicite. Le jeune Michael évolue dans un foyer toxique : un beau-père odieux, une grande sœur méprisante et provocatrice, une mère aimante mais contrainte au strip-tease pour subvenir aux besoins de la famille, et une petite sœur encore bébé. À l’école, ses camarades ne manquent pas de lui rappeler la réputation de sa mère et de sa sœur, attisant sa souffrance et nourrissant sa haine. Il commence par torturer des animaux – un élément qui n’est pas sans évoquer certaines figures du giallo italien, notamment chez Dario Argento.
Mais plus encore que son environnement, c’est l’humanité elle-même qui pousse Michael au meurtre : sa laideur morale, sa cruauté gratuite, sa bestialité, souvent associée à la sexualité. Lui-même finit par céder à cette part sombre, dissimulant son visage derrière un masque comme pour refuser de se confronter à ce qu’il est devenu. La scène du meurtre de sa grande sœur en est l’illustration la plus troublante : dans une ambiance quasi incestueuse, le couteau devient un prolongement phallique, renforçant le sous-texte dérangeant du film. Dans cette première phase de son parcours criminel, Michael ne s’en prend qu’à ceux qui l’ont fait souffrir – un point qui apparaît plus clairement dans le director’s cut, notamment avec la scène impliquant Sybil Danning.
En recontextualisant les origines de Michael, Rob Zombie justifie également de manière plus cohérente son retour à Haddonfield. Là où Carpenter avait improvisé le lien familial entre Michael et Laurie Strode pour Halloween 2, influencé par la révélation de L’Empire contre-attaque (et un pack de bières), Zombie choisit d’établir cette relation dès le départ. Cela lui permet de développer un véritable rapport frère/sœur, donnant une nouvelle dimension au parcours de Laurie.
Autre refonte majeure : le Dr. Loomis. Longtemps incarné par un Donald Pleasence obsessionnel, qui traquait Michael comme Van Helsing traquerait Dracula, le personnage prend ici une tout autre ampleur sous les traits de Malcolm McDowell. Rob Zombie va jusqu’à suggérer que Loomis a contribué à la naissance du mythe Michael Myers, voire l’a façonné en exploitant son histoire à travers un livre qui fera sa fortune et sa célébrité. Ce point sera d’ailleurs encore plus développé dans la suite du film. La relation entre Loomis et son patient devient alors proche de celle de Victor Frankenstein et sa créature. Si le mystère entourant le mal absolu était l’un des atouts du film de 1978, une simple copie n’aurait rien apporté de neuf. En réinterprétant les éléments de Carpenter avec une approche plus psychologique, Zombie enrichit le mythe plutôt que de le répéter. Certes, son film n’est pas sans défauts – paradoxalement, sa partie la plus faible est celle qui calque trop fidèlement l’original – mais il propose une vision plus brute et viscérale du personnage.
Visuellement, Halloween version 2007 frappe aussi par un Michael Myers plus impressionnant que jamais. Grâce à une mise en scène nerveuse et un nouveau look massif, il retrouve une aura menaçante qu’il n’avait plus eue depuis 1978. Un film à voir de préférence en director’s cut, pour une expérience encore plus intense.