Devil may cry, mais moi j'en chiale
Sorti en 2008, j'avais un souvenir assez positif de la démo de DMC 4, avec son gigantesque boss de feu et le bras démoniaque qui ouvrait pas mal de possibilités. Visuellement ça envoyait pour l'époque. Je me suis dit que Capcom avait réussi à négocier un peu mieux le virage next-gen que certains autres développeurs japonais.
Mon œil, ouais.
DMC 4 est sur plein d'aspects une sorte de DMC 1 en HD avec un perso supplémentaire. L'impression tenace de jouer à un jeu PS2 qui a oublié de se mettre à la page ne fait que se renforcer en y jouant : même structure en missions, des menus peu clairs et trop nombreux, les angles de caméras hérités des Resident Evil PS1 qui gênent régulièrement dans les phases de plateformes ou dans les déplacements… Ceux qui y ont joué connaissent bien le problème : vous poussez le stick dans la direction voulue, un changement vers l’angle suivant intervient mais votre perso va dans la direction opposée. Des conventions de jeux japonais parfois un poil archaïques qui m'ont fait grogner régulièrement. J’y reviendrai plus bas.
Mais d’abord, un petit mot sur le pitch. Vous incarnez Nero, un sosie ou presque de Dante, qui devra se fritter contre ce dernier quand il vient interrompre la messe en tirant une balle dans la tête du prêtre. Vous n'avez pas compris le pitch ? Moi non plus. Le sentiment ne changera pas jusqu'au générique final, rien n'est expliqué ou résolu, les motivations des persos sont inexistantes, sauf pour Nero qui veut sauver sa copine. La narration à la sauce nawak Capcom, comme d'hab. La première moitié du jeu se joue avec Nero dans un enchaînement d'environnements non-sensique au possible, sans objectifs clairs entre eux ; puis on joue avec Dante pour l'autre moitié. Problème : le poseur de la franchise est devenu technicien de surface, puisqu'il faudra refaire le jeu en sens inverse et se taper les boss déjà affrontés avec la nouvelle recrue. Une idée tout simplement mauvaise, qui est là uniquement par nécessité de recycler les niveaux du premier titre PS360 de Capcom.
Pas étonnant de la part du plus écolo des développeurs, mais ces derniers se sont dits que se farcir les streumon en chef deux fois n’était pas suffisant. On aura donc droit en guise d'avant-dernier niveau à un boss mode/jeu de l’oie random, où il faut se retaper la plupart des gros méchants boostés aux hormones, et qu’il faudra terminer d’une seule traite en l’absence de checkpoints entre chaque affrontement. Un moyen débile de délayer la sauce, et qui surtout casse le rythme du jeu en ayant lieu juste avant le dernier niveau. C’est d’autant plus dommage car la plupart des boss sont assez cools, ont des designs sympas et sont intéressants à affronter. Les réutiliser autant dilue leur intérêt.
Rythme à la rue et absence de checkpoints, deux autres points qui m’ont particulièrement agacé pendant mes parties. Le rythme du jeu est assez déséquilibré. L’une des causes sont les cinématiques, qui même si remplies de moments assez cools, sont trop nombreuses et trop longues. Les doubleurs sont heureusement assez bons, mention spéciale au moment où Dante revisite la scène du crâne de Hamlet avec le boss qu'il s'apprête à affronter, plutôt drôle. L’autre source de cette impression est la durée aléatoire des missions : certaines se torchent en moins de 10 minutes en prenant son temps, tandis que d’autres peuvent atteindre 30 à 40 minutes, avec parfois un boss au milieu. En mode Normal j'ai mis environ 15 heures pour terminer mon run, mais il aurait à mon goût dû rester sous les 10 heures. Ces 5 heures en trop au compteur ne sont pas à mettre sur le compte de la difficulté mais plutôt sur le manque de checkpoints. Un problème récurrent durant tout le jeu mais qui touche surtout la partie avec Nero. Rien de plus frustrant que de recommencer plusieurs fois un boss pour mourir juste après sous les coups d’ennemis normaux ou de devoir se retaper plusieurs salles avant d’avoir droit à un nouvel essai. Un checkpoint avant ou après un affrontement n’aurait franchement pas été du luxe. Le fait que l’on doive terminer les missions d’une traite participe également à cette impression de perte de temps. Une modernisation de tout ça aurait été la bienvenue, histoire d’apporter un peu de confort et de flexibilité pour le joueur, mais aussi du dynamisme dans un jeu qui se veut over the top. Cette tendance au streamlining de l’expérience de jeu était déjà présente en 2008… dans les titres occidentaux.
Mais revenons à l’intérêt principal de DMC 4, à savoir son gameplay. De ce côté-là c’est bien mieux, et heureusement. Nero conserve la base épée/gun/saut que l’on connaît, mais certains de ses mouvements apportent un peu de fraîcheur. Comme dit plus haut son bras démoniaque permet des combos intéressants, en attirant les ennemis vers soi ou en se tractant vers eux. On peut également les saisir lorsqu’on est proches d’eux, ce qui occasionnera des dégâts conséquents parfois accompagnés d’animations automatiques. Si l’on active la furie, ces coups sont étendus et font bien plus mal. Une autre aptitude optionnelle consiste à appuyer sur une gâchette juste après une attaque pour charger son épée, ce qui enflamme votre lame et donne accès à des attaques plus puissantes. Pas évident à utiliser dans le feu de l’action car le timing est très précis. Quant à Dante, on le retrouve avec ses styles issus de DMC 3. Il est bien plus difficile à prendre en main, surtout si l’on n’a pas joué à l’opus précédent. Mais les possibilités d’enchaînements sont hallucinantes. On peut changer à la volée entre 4 styles, 3 armes blanches et 3 armes à feu, dont la dernière peut prendre plusieurs formes dévastatrices. On pourra éventuellement trouver certaines animations un poil rigides ou lentes, comme par exemple la vitesse de déplacement des protagonistes, atrocement molle. On peut heureusement acheter une aptitude pour aller plus vite, mais la course ne se déclenche que lorsqu’on maintient le stick dans une direction pendant de trop longues secondes. La vitesse de base aurait tout simplement dû être cette dernière.
Le level design reste dans la lignée de la série, où l’on alterne intérieurs et extérieurs, avec un peu d’exploration et quelques puzzles relous mais pas bien compliqués, eux aussi empruntés directement à Resident Evil. Comme d’hab le mode histoire n’est qu’un apéritif pour se préparer aux difficultés supérieures et au mode survival qu’est le Bloody Palace. C’est dans ce mode qu’il sera le plus facile de récolter des orbes et des âmes pour récupérer toutes les aptitudes, trop chères pour être toutes achetées en un seul run. Heureusement ces choix ne sont pas définitifs et les âmes sont remboursées, ce qui permet de les essayer sans conséquence.
Sur le plan technique le jeu reste tout à fait correct 5 ans après sa sortie, même si l’on peut déplorer quelques chutes de framerate à certains endroits et des ombres un peu carrées, assez similaires à ce qu’on peut trouver sur des jeux 360. C’est manifestement la version qui a servi de base au portage sur PC. Celui-ci est d’ailleurs bien fichu, surtout qu’il est sorti à peine quelques mois après les versions console. La plupart des réglages graphiques courants sont disponibles, ainsi qu’une option DirectX 10. J’ai eu droit à quelques plantages en pleine partie, et forcément ce mode est plus exigeant au détriment des performances. Les temps de chargement entre les menus y sont bizarrement absents, alors qu’ils sont présents en DirectX 9. La différence visuelle entre les deux semble minime, mais c’est cool que l’option soit présente. Les musiques sont assez similaires à celles de DMC 1 dans l'esprit, un poil répétitives peut-être. Les bruitages font le job.
Bref, en guise de conclusion je vous donne un TL :DR : le gameplay est bien, le mode story l’est moins à cause de plein de défauts d’un autre âge qui gênent la progression. Mais comme c’est le gros morceau du jeu et que les masochistes doivent se le retaper, bah ça fait chier.