En 1967, Chris Taylor s’engage volontairement dans la guerre du Vietnam. Bleusaille inexpérimentée, il découvre très vite la dureté de son quotidien : la jungle, la mort et l’incompréhension sur leur mission. Chris remarque par ailleurs la rivalité grandissante entre le sergent Elias et le terrible sergent Barnes. Au-delà de leurs méthodes, c’est leur vision de la guerre qui est irréconciliable.

Oliver Stone n’est plus à présenter. Mais, à l’époque (en 1986), il n’avait que 2 films à son actif. Il était surtout connu pour ses scénarios (notamment Conan le Barbare, Scarface et L’Année du dragon). Qu’importe, le réalisateur voit grand et démarre une trilogie dénonçant la guerre du Vietnam dont Platoon est la première partie. Force est de constater que ce film appartient désormais aux légendes incontournables traitant de cette guerre.

Pour le rôle principal, Oliver Stone embauche Charlie Sheen, le fils de Martin qui jouait dans le chef-d’œuvre de son collègue Francis Ford Coppola, Apocalypse Now. La jeunesse et la candeur de cet acteur (il a 21 ans en 1986) offrent un excellent contraste sur la problématique exposée dans Platoon. Le casting comprend ensuite deux acteurs connus à l’époque : Tom Berenger, vraiment très crédible dans les rôles de militaires, et le grand Willem Dafoe. Les autres sont de petits jeunes, et on est surpris de croiser Forest Whitaker et Johnny Depp.

Si Apocalypse Now s’appliquait à décortiquer la folie traumatique, Platoon se penche sur la manière de faire la guerre et confronte deux visions radicalement différentes campées par les deux sergents. D’un côté, Elias est persuadé d’aider la population en la défendant contre les vilains communistes. Ce point de vue post-chevaleresque est empreint de piété chrétienne et d’un brin de colonialisme.

De l’autre, Barnes incarne la destruction dans sa plus terrible efficacité. Vaincre son adversaire demande moins d’abattre ses soldats que leur esprit. Pour cela, il faut effectuer des actes atroces qui brisent la psyché des gens sains d’esprit. C’est exactement ce qu’a compris le colonel Kurtz dans Apocalypse Now, mais au prix de sa santé mentale. La guerre est sale, dure et cruelle. Cette réalité ne doit donc pas être ignorée, mais au contraire embrassée pour pouvoir vaincre. Malheureusement, elle plonge irrémédiablement ses adeptes dans la folie. Cette réplique résume parfaitement sa vision psychotique de la guerre :

Elias' a waterwalker ... like them politicians in Washington. Want to fight their war with one hand tied round their balls. Ain't no time or need for a courtroom out here ...

Ce débat, existant dans notre société depuis qu’elle s’est débarrassée (en majorité) de la psychose, est également exposé dans Swordfish de Dominic Sena avec la théorie de Gabriel ou encore dans Jin-Roh avec les états d’âme de l’agent Fuse. Il est inhérent à toute armée qui troque son humanité contre de l’efficacité.

La fin, bien qu’attendue (Barnes ne peut moralement pas gagner), n’en est pas moins intéressante. En effet, Chris tue moins le sergent Barnes que ce qu’il craint de devenir. Il a démontré son mépris de la mort ainsi que sa sauvagerie dans la bataille qu’il vient de livrer. Dès lors, il glisse sur une pente dangereuse et sans retour. Ses larmes finales sont d’ailleurs versées sur la part de son humanité qui est morte dans ce combat. Heureusement pour lui, sa descente s’arrête avec son retour au pays.

Platoon est un film incontournable sur la guerre du Vietnam. Il décrit l’une des problématiques de cette guerre (et de la guerre moderne plus généralement) avec efficacité. Bien que dur, ce film ne tombe jamais dans l’horreur physique ou psychologique et décrit de l’intérieur les affres de la conscience confrontée à l’indicible. Une grande œuvre, donc.

Activité sur Platoon