Partie sans spoilers

Brat, ou Frère en français, est une perle rare du cinéma russe. Pour moi, ce film est une œuvre contemplative, qui transcende son cadre de mafia pour devenir une tranche de vie à part entière. Ce qui m’a marqué, ce n’est pas tant l’univers criminel, mais la manière dont le personnage principal traverse ses épreuves dans une Russie post-soviétique. On sent profondément l’empreinte de l’ère Ieltsine : un monde chaotique où le crime organisé règne souvent en maître.

Le film est imprégné de musique, un élément clé qui adoucit et humanise la violence brutale à laquelle fait face le héros. Cela m’a rappelé des réalisateurs comme Xavier Dolan, qui utilisent la musique pour amplifier les émotions des spectateurs. Ici, la musique n’est pas qu’un simple fond sonore : elle est un miroir des sentiments et des réflexions du personnage principal.

Ce qui m’a impressionné, c’est le calme et le stoïcisme du héros, un homme marqué par ses années de service militaire. Les scènes, souvent lentes et introspectives, donnent une profondeur rare au film. Malgré son budget limité, Brat montre que la qualité ne réside pas dans des explosions spectaculaires, mais dans l’émotion et la réflexion qu’un film peut transmettre.

Partie avec spoilers

Une scène particulièrement marquante est celle où le héros, accompagné de deux acolytes, doit tuer une cible. Mais avant, il monte chez un voisin pour demander une aspirine, et tombe sur une fête d’anniversaire. Il s’assied, contemple les invités qui chantent, dansent, et mangent paisiblement. Ce moment suspendu est à la fois poignant et tragique : on sent que le personnage réalise qu’il pourrait mener une vie meilleure, mais la violence le rattrape lorsqu’il doit redescendre pour retrouver ses complices.

Le film montre également des relations complexes, comme celle entre le héros et sa compagne. Dans une scène bouleversante, il sauve cette dernière de son ex violent en lui tirant dessus, mais elle choisit pourtant de rester auprès de son agresseur. Ce moment illustre brillamment comment certains traumatismes poussent à s’attacher aux mauvaises personnes, même face à une alternative plus saine.

La bande sonore est omniprésente et sert souvent de seul moyen d’expression pour le personnage principal. Une scène de discothèque, où il danse avec une femme tout en trompant symboliquement sa compagne, est magnifiquement mise en musique par un son du groupe E-rotic, renforçant l’émotion et l’intensité de l’instant.

Les éléments post-soviétiques, comme les publicités pour Coca-Cola ou la présence de McDonald’s, ajoutent une couche de réalisme et de symbolisme, montrant un pays tiraillé entre modernité occidentale et traditions locales. Cela reflète aussi le dilemme intérieur du personnage : mener une vie calme et paisible ou poursuivre une existence criminelle mais lucrative.

Note finale

Brat est un film brut et authentique, une véritable fenêtre sur une époque et un lieu souvent oubliés du grand public. Il ne s’agit pas d’un film d’action classique, mais d’une œuvre qui interroge les conséquences de la violence sur les individus. Son esthétique contemplative et sa bande-son remarquable en font un chef-d’œuvre du cinéma russe, et au-delà.

Note : 9/10. Je vous le recommande vivement en Blu-ray ou en streaming.

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