J’avais très envie de voir Eiffel au cinéma. Le sujet m’intéressait et les affiches semblaient me conforter dans le fait que le film parlerait de la relation d’Eiffel à sa grande œuvre, la Tour Eiffel. Sur ce plan, je n’ai pas été déçu. Toutes les parties traitant de la Tour Eiffel sont à la hauteur. Mais l’ennui c’est que la grande majorité du film porte sur une romance niaiseuse et essentiellement fictive entre Eiffel et une noble bordelaise.

Commençons par le bon. Le film est très beau, notamment grâce au travail sur la lumière. Les scènes autour de la construction de la Tour sont globalement justes. Je pense notamment à la scène où Eiffel explique avec beaucoup de pédagogie comment la Tour sera construite au conseil qui doit décider si elle sera érigée. Je pense aussi à la scène où le premier étage est complété. Elle réussit à créer de la tension et du vertige autour de la pose du dernier rivet. Le film traite de deux autres sujets qui auraient gagné à avoir plus de temps d’écran : les luttes des ouvriers pour plus de salaire et plus de protection, et la relation électrique de la Tour avec les Parisiens dans ses débuts. Le premier sujet est évacué par un discours motivationnel d’Eiffel passable et le second n’est juste plus mentionné passé son introduction.

Ces éléments sont écourtés pour donner un maximum de temps à la « romance ». C’est le genre d’histoire où ils se regardent et tout est dit. La noble n’a presque pas de personnalité et n’a pas une seule vraie conversation dans le film. Je ne suis pas sûr qu’elle ait une phrase de plus de dix mots. Dans ce contexte, il va sans dire que le film ne passe pas le test de Bechdel. Leur histoire d’amour n’est même pas cohérente à mes yeux : pourquoi Adrienne ne revient-elle pas vers Eiffel une fois la tour finie, lorsque son mari n’est plus en mesure de lui faire du chantage financier ? Quant à la Tour Eiffel, Eiffel et Adrienne n’en parlent pas une seule fois durant le film. La romance et la construction de la Tour semblent deux histoires séparées jusqu’à la scène finale qui laisse penser que la Tour est un A comme Adrienne. C’est une jolie anecdote mais on ne peut pas baser un film entier sur cela.

Surtout un film sur quelqu’un comme Eiffel. Moi j’aurais aimé voir sa jeunesse, ses études, la réalisation de la Statue de la Liberté, ses ponts en Europe et ailleurs et aussi sa vie après 1889, notamment comment il a empêché la destruction de la Tour 20 ans après sa construction. Il y avait tant de choses à dire mais non, ils se sont sentis obligés de remplacer tout cela par une énième romance. J’en ai vraiment marre que ce soit un passage obligé dans la plupart des films. On dirait que même les acteurs n’y croient plus, et pourtant d’ordinaire j’adore Romain Duris et Emma Mackey.

Au bilan : un film qui ne remplit pas ses promesses et qui participe à la perpétuation de vieux clichés de cinéma accablants de sexisme et d’ennui.

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