L'année qui vient de rendre l'âme fut riche en enseignements. Les groupes apparus ces derniers mois ne sont obsédés que par une seule chose : l'apparence. On aurait aimé que les petits nouveaux ne soient pas que la copie carbone H&M de leurs propres icônes. Si tout le monde s'évertue à faire danser les filles comme les garçons sur des rythmes énervés, pas un n'arrive pour l'instant à la cheville des artistes plagiés, et les genres revisités sans grâce ne sont que des gimmicks, et pas des passions chevillées au corps. Un peu comme si à l'école des popstars, la spécialité de fin d'étude était britpop, post-punk ou cold-wave, par exemple. Pourtant, une bande d'étudiants un peu beatnick venue des Antipodes semble prête à secouer cette scène dans l'impasse. Architecture In Helsinki a publié un album en 2004, dans lequel germaient déjà les bases de sa musique incontrôlable. Mais la formation d'alors semblait la jouer petit bras, comme si elle n'avait pas encore décidé de frapper un grand coup. Avec In Case We Die, c'est fait et bien fait. Plus de doute possible, vous pouvez prévenir votre entourage : les Australiens débarquent et vont faire parler d'eux. Serait-ce la parution de Funeral d'Arcade Fire qui les a déchaînés ? Quelques similitudes surnagent avec le disque des Canadiens : même choc à la première écoute, mêmes références funestes dans les titres, même sensation de fraîcheur et d'originalité. Aux manettes de ce projet inclassable, le chanteur et guitariste Cameron Bird mène sa troupe avec une précision... architecturale. Ses compères sont au nombre de sept, dont trois filles, et chacun jongle entre les instruments, qui vont de la flûte à bec aux synthétiseurs en passant par une section de cuivres digne du cirque Pinder, avec tuba, trombone ou trompette. Il faut voir avec quelle minutie ces musiciens se partagent cet attirail sur scène lorsqu'ils jouent en concert. L'émulation fonctionne à plein entre les Wallabies, chacun ayant apporté pendant l'enregistrement un nouvel instrument pour montrer aux autres sa capacité à composer à partir de cette trouvaille. Au final, quarante personnes auraient participé à l'élaboration de la grande oeuvre que constitue ce deuxième album. On n'ose imaginer le nombre de joints roulés et de litres de café avalés. En quarante minutes top chrono, la confrérie de hippies mélange tout et fait des pieds de nez et des clés de bras aux intégristes de tout poil. Fantasme de groupe indépendant, la bande de Melbourne malaxe les genres et les époques pour recracher une pop foutraque et euphorique, mais n'a besoin ni de toges ni de tongs pour déclencher l'enthousiasme. Une mise en bouche grandiloquente digne des plus conceptuelles oeuvres des années 1970 nous fait entrer dans ce millefeuille de sonorités avant de muer en jolie comptine pastorale et de se terminer en envolée chaotique. Le tube certifié Do The Whirlwind, une ritournelle electro et lo-fi imparable, marie de façon improbable Pleasure Of Love de Tom Tom Club et Beercan de Beck et sonne comme un morceau d'île déserte. Ailleurs, c'est Belle And Sebastian qui copine avec Liquid Liquid, tandis que Vangelis se retrouve en train de jammer avec les Specials. Les titres sont tous bâtis sur ce grand n'importe quoi, cette succession de dérapages contrôlés, orchestrés et conçus en parfaite connaissance des trois dernières décennies musicales. Il est presque impossible de déterminer le nombre d'influences qui parsèment ces compositions libres, entre soul, electro et reggae. Gageons qu'avec le nombre d'idées contenues dans chaque chanson, leurs concurrents pourraient bâtir une carrière entière. Seuls certains fous furieux comme les fantastiques The Go! Team ou les lumineux The Flaming Lips peuvent suivre cette chorale exaltée sur ce terrain sans limites. Les méconnus Papas Fritas, des Américains qui explosaient les carcans de la musique populaire, le clamaient haut et fort : "Pop has freed us". On compte désormais sur Architecture In Helsinki pour libérer la musique pop. (Magic)
C’est via leur précédent album (« Fingers Crossed ») que les huit lutins de Architecture in Helsinki se sont révélés au grand public. Une très bonne première réalisation qui a le chic de plonger vos fesses au plus profond d’un doux nuage pop fait de papier toilette alvéolé. On retrouve dans « In Case We Die » la jungle d’instruments employée à l’habitude par ce mini orchestre. Trombone, trompette, clarinette, tuba et percussions en tout genre nourrissent les morceaux avec générosité. On goûte avec amusement à ces improvisations instrumentales faites de soubresauts sonores.
Comme l’illustre assez bien Neverevereverdid, les huit Australiens ont décidé de mettre un peu de piment dans leur pop d’oreiller. Lorsque le rythme s’accélère, les chansons prennent une tournure pop-rock guillerette dans la veine des Papa’s Fritas (Wishbone). Deux voix masculine et féminine candides se complètent ou alternent suivant les humeurs. Le ton est enjoué et énergique à l’image d’un The Cemetery, à la puissance power pop assez fofolle. Petite ombre au tableau, un Do The Whirlwind un peu en deçà. Si les Mini Pouces montaient un groupe pop, nous ne serions pas loin de ce que l’on entend sur « In Case We Die » : de mignons petits tubes power pop en rafales. (indiepoprock)
Imaginez un groupe de bambins légèrement azimutés, emmenez-les en centre ville, lâchez-les dans un magasin contenant tout ce que la création peut compter d’instruments de musique (et oui, même des kazous) et vous aurez une petite idée de ce que peut donner “In Case We Die” de Architecture in Helsinki. Mais difficile de réellement imaginer le potentiel destructeur de ce groupe australien avant d’avoir entendu quelques notes de ce second album.Destructeur? Et oui, ces 8 musiciens (et la trentaine d’amis qui participe à cette galette) sont des terroristes bien décidés à faire exploser les structures de la musique pop comme le firent les Fiery Furnace avec leur légendaire “Blueberry Boat”. L’exercice est hautement périlleux, pour ne pas dire casse gueule, et on ne compte plus les groupes qui s’y essayèrent pour ne jamais s’en relever. Et pourtant, cet octet réussi un tour de force en passant haut la main cette épreuve et sans avoir l’air de se donner le moindre mal. Leur force? Un art de la chorale déglinguée que Architecture In Helsinki partage avec The Polyphonic Spree (”Nevereverdid”), des mélodies légères et régressives que ne renierait pas John Wayne Shot Me, et un sens de l’orchestration complètement branque appliqué à des chansons de 3 minutes où se croisent xylos mutins, choeurs pré pubères et armées de cuivres. A dire vrai, Architecture in Helsinki ressemble une fanfare de cirque dans laquelle chacun joue de son instrument, quelque chose de joyeusement bordélique, de faussement structuré et de réellement efficace. Prometteur. (mowno)