Drôle de timing. Annoncé depuis 2011 comme l'avenir du rap et noyé, dès son apparition, sous une pluie de dollars, ASAP Rocky débarque, en douce, à l'heure du gel et de la gueule de bois. Et, pour tout dire, un peu après la bataille. Sur le front d'un renouveau de la musique black américaine, son premier album tant attendu (et constamment repoussé) s'est fait doubler en beauté par les révélations majeures de 2012, Frank Ocean et Kendrick Lamar. Comme ce dernier, né à Compton, pays de Dr Dre, ASAP Rocky est un enfant du rap (prénommé Rakim en hommage à un héros des années 1980), qui en a assimilé, jusqu'au vertige, les tours et les techniques. Son territoire, c'est Harlem, mais son ADN porte la trace de tous les courants qui ont irrigué le rap de ces dernières années, celui du Sud, d'OutKast et Lil Wayne notamment, des cadences vocales délirantes aux ambiances de train fantôme. Musicalement, Long Live ASAP est un premier album de haute volée, qui nous promène dans un dédale futuriste où l'on croise aussi bien Santigold et Skrillex qu'une armada de jeunes rappeurs survoltés. ASAP Rocky, qui cale ses acrobaties sur tous les tempos, y est à la hauteur de sa réputation naissante, mais ses textes restent trop collés au premier degré de ses fixettes (le sexe, l'argent, le sexe, les fringues, le sexe...) pour réellement faire de l'ombre à la concurrence.