Three Trapped Tigers sont fascinants. Leur dessein premier était de transposer l'electronica des Aphex Twin et autres Squarepusher avec des instruments live, guitare, batterie et claviers, un objectif pour le moins ambitieux et profondément excitant. D'autant que nos trois tigres ne peuvent être mis en cage et dépassent allègrement la transposition pour s'aventurer en terres inconnues. Brouillant les pistes, outrepassant les genres, ces chatons aux dents longues et tranchantes sortent enfin leur premier album, Route One Or Die, griffé et mordant.
Three Trapped Tigers font partie de ces rares groupes dont l'esthétique est tellement marquée que vous reconnaissez leur touche aux premiers instants. Dès l'ouverture, le brillant Cramm, nous retrouvons tout ce qui fait leur force : une section rythmique basse/batterie redoutable et ces clairs obscurs si singuliers, alternant passages contemplatifs avec furies sonores. Outre l'electronica, le trio brasse large, caressant jazz, expérimental, prog-rock et son enfant illégitime math-rock, mais s'avance aussi en terrain miné en mettant un pied dans les musiques dures : post-hardcore ou metal avec plus (Drebin, meilleur morceau de l'album) ou moins (Noise Trade au final virant gros rock adipeux) de succès.
Si sur le papier la musique de Three Trapped Tigers a quelque chose de profondément intellectuel, inaccessible et opaque, éloignée du format pop qui me tient tellement à cœur, elle est pourtant étonnamment abordable. La raison est qu'aux milieux du fracas, du chaos et de cette débauche d'énergie animale, des mélodies lumineuses viennent éclairer l'obscurité (Reset).
Loin de faire dans la redite de leur trilogie d'EP, Three Trapped Tigers poussent le concept encore plus loin et décrochent la timbale sur Route One Or Die. Cet album chatouille de ses griffes acérées le chef d'oeuvre et nous ne pouvons pas réellement lui reprocher de s'égarer un peu tant les chemins possibles sont nombreux. Le fait est que Three Trapped Tigers, plus que n'importe quel autre groupe aujourd'hui, ouvrent des voies. Qui a dit que la musique était un éternel recommencement ?
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