The Magic Whip
6.5
The Magic Whip

Album de Blur (2015)

Qui aurait pu prédire qu’on serait actuellement en train de décortiquer le nouvel album de Blur, hein ? Et pourtant, c’est bien le cas. Dans l’excitation la plus totale, les internets apprennent la nouvelle : Blur prépare une conférence de presse. L’info se répand, et en quelques minutes tout le monde spécule et semble réaliser que l’heure du fameux retour est arrivée. Bingo. Damon et le reste du groupe officialise la chose devant un parterre de journalistes et surtout, devant le monde entier - la conférence étant filmée et diffusée en ligne. The Magic Whip, donc. C’est le petit nom de l’album qui est devenu en quelques semaines l’un des albums les plus attendus de l’année. 90% de l’album a été composé à Hong Kong, lieu où le groupe était en tournée et a profité de l’annulation d’une date au Japon pour aller en studio. Le tout a ensuite été finalisé à Londres en compagnie de leur producteur d’origine Stephen Street.


L’attente n’a pas été trop longue entre le moment de l’annonce et la sortie, d’autant plus que le groupe a dévoilé la moitié des titres en cours de route. La première chanson concernée s’intitule « Go Out », morceau catchy et lo-fi aux guitares tranchantes. Hyper efficace, il suffit seulement d’une deuxième écoute pour se retrouver avec son refrain en tête. Une entrée en matière très solide. Le reste se veut plus diversifié, sans pour autant être révolutionnaire. Tout ce qui se trouve sur The Magic Whip vous fera probablement penser à un des projets de Damon Albarn, avec plus ou moins de réussite. Les titres les plus enjoués, « Lonesome Street » et « I Broadcast », font partie des grosses machines de l’album. Le premier fait part d’une fraicheur pop très blurienne, presque psyché, et assemblant de multiples sonorités avec réussite tandis que le second nous replonge dans les réalisations les plus énergiques du groupe. Assurément le tube de l’album qui s’annonce encore bien tonique et fédérateur en live.


Mais ces escapades remuantes ne sont pas la marque de fabrique de The Magic Whip, l’album étant composé majoritairement de ballades mélancoliques et intimistes. Certaines d’entre elles sont un peu fades, ne dégagent rien ou presque. « New World Towers », « Ice Cream Man » ou « My Terracotta Heart » nous rappellent que Damon peut être soporifique quand il veut (cf. son album solo, disons-le). Mais outre ces quelques moments sirupeux, il est nécessaire de reconnaitre la qualité du songwriting qui fait toujours effet chez Blur. Notamment sur le glaçant « There Are Too Many Of Us » et la question de la surpopulation emmenée par cette voix pesante et cette cadence très sentencieuse, ou encore sur « My Terracotta Heart » quand Damon semble évoquer avec honnêteté sa relation pas toujours facile avec Graham. L’album est très largement inspiré de ce périple sur le continent asiatique, que ce soit dans les textes qui nous offrent un voyage en terre inconnue (sans Frédéric Lopez) mais également dans ses sonorités orientales subtiles et dépaysantes à souhait sur « Mirrorball » ou « Thought I Was A Spaceman ». La magie opère si on lui laisse le temps et on finit par s’incliner. Blur arrive parfaitement à allier subtilité et efficacité, tout comme sur le très solaire « Ghost Ship » et sa ligne de basse chaleureuse ainsi que « Pyongyang » où claviers, guitare et mélodies en font un titre magistral de presque six minutes.


Le Blur édition 2015 rassure donc en délivrant des piqures de rappel en début d’album avec quelques titres efficaces qui nous ramènent au cœur des nineties, avant de décoller pour de bon vers l’avenir et d’offrir un cocktail osé de compositions fragiles au tempo assez lent et aux expérimentations électroniques. Si The Magic Whip est déroutant à la première écoute et comporte quelques morceaux soporifiques, on retient au final un album qui dans sa globalité reste captivant et arrive à créer une véritable atmosphère entre mélancolie, chaos urbain et solitude. Le tableau n’est pas toujours très réjouissant mais il est beau et sincère, et nous rappelle que Blur n’est pas un groupe du passé puisqu’il peut, la preuve en est, encore façonner le paysage musical moderne avec brio.

eveningsam
8
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le 17 mai 2015

Critique lue 485 fois

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eveningsam

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