Et si on ne gardait que les photos du Libération du 14 février 2012, sans en modifier l'ordre, pour en tirer une bande-dessinée?
Cinq auteurs se sont prêtés au jeu pour notre plus grand plaisir et chacun a rendu une bande dessinée originale. Il s'agit donc d'un recueil de cinq courtes bds. C'est un reproche d'ailleurs qu'on pourrait lui faire, on en voudrait plus!
Les histoires sont alambiquées certes, et j'imagine que c'est la raison des notes basses données sur sens critique. Mais beaucoup moins alambiquées que dans d'autres exercices, comme celui de L'oupus 4 (qui a d'autres intérêts). Une narration un peu bordélique, c'est le charme des exercices oulipiens.
Ce qui m'a plu de cette contrainte, par rapport à celles d'autres collectifs oubapiens, c'est qu'elle a demandé aux auteurs de faire preuve d'une grande d'imagination, pour tisser un fil entre les images et en faire un tout relativement cohérent.
Chaque auteur a d'ailleurs choisi un genre et un style propre. Y a-t-il eu une entente pour s'assurer de ne pas être redondant? Je reproche au recueil d'être trop court, mais peut-être qu'on aurait vu des idées surgir plus d'une fois avec plusieurs d'auteurs...
Si on ne connaissait pas la contrainte imposée, aurait-on la même appréciation de l'œuvre? Je ne crois pas. Il y a un certain plaisir à comparer les œuvres entre elles, à analyser les différents processus créatifs, à voir comment un auteur adapte à ses fins un cadrage de photo, comment un autre s'en tire en modifiant légèrement un détail qui changera tout pour son histoire, comment les mêmes photos deviennent des cases clés chez plusieurs, et comment d'autres trichent un peu...
À ce sujet, le Libération aurait dû être fourni avec le livre. Ou du moins les photos. Cela manquait cruellement. Pour qu'on puisse voir avant de lire les œuvres ce qui avait été imposé. On aurait peut-être même fait notre propre histoire intérieure et participé à l'exercice. On peut toujours aller sur les archives du journal pour consulter chaque article un par un, mais c'est fastidieux.
Je suis en train de lire L'oupus 6, et il y a beaucoup plus de détails sur chaque exercice (une critique viendra plus tard peut-être).
Oubapo?
Vous connaissez peut-être La disparition de Georges Perec, un roman entièrement écrit sans la lettre "e". Perec emprunte à l'oulipo, "ouvroir de littérature potentielle", l'idée de s'imposer une contrainte formelle pour écrire. À l'instar de l'oulipo, l'oubapo, "ouvroir de bande-dessinée potentielle", propose des exercices et contraintes pour le 9e art. Essayez à la maison si vous avez envie d'écrire mais êtes en panne d'inspiration!
L'Oubapo est de plus une collection de bande-dessinées de l'Association. Au fil des publications de la collection, on retrouve avec plaisir les mêmes contributeurs qui osent se prêter au jeu.