Au nom du père, du fils et de Bill
Je ne comprendrai jamais l'intérêt d'avoir refait les couvertures pour les rééditions. Autant le changement de numéros je peux comprendre (un nombre de pages égal pour tous les albums), quoique ça reste dans un but comercial plus que criticable. Mais refaire carrément la couverture, on dirait que c'est juste pour donner encore plus de sous au dessinateur qui a repris la série. Le pire, c'est que les nouvelles couvertures, même si elles épousent bien le style de Roba, sont moins bien. La preuve en est avec ce 15 ème tome. Dans la nouvelle couverture, on voit le papa de Boule qui se prend seulement l'os dans les pieds. Ici, il est déjà à terre. La différence, c'est le pouvoir de suggestion ou, en un autre mot, l'ellipse ! L'ellipse, c'est ce qu'on ne voit pas. On en a partout en art : dans une photo, l'ellipse correspond à ce qui dépasse du cadre ; au cinéma, c'est le hors cadre mais aussi ce qui peut se passer entre deux scènes (par exemple on voit rarement un personnage faire pipi ou se brosser les dents ou encore payer ses contributions, c'est ellipsé) ; la bande dessinée est certainement l'art plastique qui sollicite le plus l'ellipse car la narration proposée est entrecoupée à chaque case, il n'y a aucune réelle continuité, on pourrait découper un mouvement à l'infini. Dans l'ancienne couverture, le lecteur peut imaginer beaucoup plus de choses sur la façon dont le papa s'est pris le pied, la responsabilité de Boule là dedans, etc. et la raclée que Bill recevra d'après le visage colérique du père. Dans la nouvelle couverture, on ne peut rien deviner car on est dans l'entre deux, juste ce qu'il ne faut pas montrer : on sait comment le papa est tombé, visiblement il marchait tranquillement, on comprend bien que Boule n'a rien à voir, et la continuité directe, la chute, ne laisse supposer aucun surprise. Pire, le titre ne fonctionne qu'avec l'ancienne couverture, puisqu'il est normal de s'exprimer de la sorte après la chute, et non pendant... Mais bon soit... Si Dupuis peut rentrer un peu d'argent, espérons que ce soit pour donner sa chance à un auteur débutant.
Ce quinzième tome des gags de Boule et Bill est sympathique, comme toujours. Roba se montre un peu plus jusqu'au-boutiste que dans l'album précédent, et pour cela l'abum est meilleur. Ce n'est pas vraiment renouveler l'univers, ce n'est pas nécessaire, mais c'est parvenir à l'exploiter davantage, à aller plus loin, sans rien trahir de l'esprit originel. Côté graphisme, rien à redire, Roba a trouvé la formule, il connaît bien ses canons, quelques rares erreurs ici et là, mais rien de pénalisant.
Bref, un bon album qui remonte un peu le niveau atteint précédemment.