Après avoir enchaîné deux longs-métrages de science-fiction aux contenus assez violents (RoboCop et Total Recall), le Néerlandais Paul Verhoeven se plonge dans le polar. Ou plus précisément lance une mode qu’est le thriller érotique avec Basic Instinct. Film qui fit réagir la presse américaine pour bon nombre de raisons (scènes sexuelles trop explicites, film jugé misogyne, biphobe et homophobe…) mais qui connu un énorme succès, aussi bien critique (à l’international) que commercial. Retour donc sur l’un des films les plus rentables de 1992 !
Préparez-vous à être étonnés car Basic Instinct est franchement une excellente surprise ! En effet, le film, bien que surfant à fond sur l’érotisme, n’atteint jamais le côté niais et dégueulasse des films du genre (sans parler de tous les navets qui n’ont que pour but de faire plaisir aux obsédés qui veulent se rincer l’œil). Car Basic Instinct sait laisser de côté les scènes de sexe quand il faut pour mieux se plonger dans l’enquête qui est en cours. Eh oui, il ne faut pas oublier que Basic Instinct est avant tout un film policier ! Qui suit un flic au passé bien mystérieux qui enquête sur le meurtre d’un homme (assassiné via un pic à glace pendant une nuit « mouvementée », évidemment !) et qui tombe peu à peu amoureux de la principale coupable de l’affaire, une romancière qui émoustille les sens dès qu’on la voie ! Et qui, surtout, joue moralement avec toutes les personnes qui l’entourent. Croyez-moi, voir ce personnage qui sent bon la culpabilité cache bien son jeu : il nous fait douter jusqu’au bout ! Jusqu’au dernier plan qui nous révèle si cette fameuse Catherine Tramell est la tueuse ou non que tout le monde recherche. De bout en bout, le film livre un suspense vraiment haletant qui tient sans difficulté en haleine ! Ce n’est pas difficile, on se plonge irrémédiablement dans l’enquête, on est pressé de savoir le dénouement… Sans oublier que le personnage principal, l’inspecteur Nick Curran se trouve être nettement travaillé pour intéresser et surtout apporter un supplément au déroulement de l’affaire (ses pulsions violentes et sexuelles).
Il faut dire aussi que Basic Instinct propose une bien belle brochette de comédiens. Et là, je critique les Razzie Awards (l’exact contraire des Oscars, qui récompensent les « pires quelque chose») qui se sont permis de nominer Michael Douglas, Sharon Stone et Jeanne Tripplehorn. Alors là, pas d’accord ! Déjà Michael Douglas ! Certes, il n’est pas aussi bon que pour le rôle de Gordon Gekko (Wall Street) mais il est suffisamment bon pour donner assez de caractères pour rendre son protagoniste déplaisant (un vrai antihéros !). Jeanne Tripplehorn suscite l’attention. Quant à Sharon Stone, il n’y a rien à redire : grande révélation du film (même si l’actrice était déjà dans Total Recall) et immense sex symbol international. Elle joue à merveille l’ambigüité entre l’allumeuse et la femme fatale, qui nous fait fantasmer autant que possible. Une véritable beauté ! On comprend bien du coup que Wayne Knight sue à grosses gouttes, avec ses lunettes embuées à la vue de l’entre-jambe de Catherine Tramell (scène culte).
Mais donc, les scènes de sexe, à quoi servent-elles ? Juste à calmer (ou exciter, cela dépend des cas) les ardeurs des plus pervers ? C’est sur ce mot que Paul Verhoeven s’amuse à explorer les différentes facettes. Car les séquences chaudement explicites ne sont pas là pour embellir nos yeux (ah, le corps de Sharon Stone !!) mais pour s’accorder avec le suspense de l’ensemble. Et pour cause, ces dernière sont filmées et montées pour titiller notre propre perversité ! Celle qui fait de nous de véritables voyeurs assistant avec plaisir aux ébats d’un couple. Mais aussi celle qui nous triture les méninges, qui nous tient en haleine. Et pour cela, Basic Instinct nous propose des scènes de sexe incroyablement haletantes. Où chacune nous fait douter sur la culpabilité de Tramell dans cette affaire de meurtre. Et pour cela, il suffit d’un plan où cette femme, lors d’un orgasme, étire son bras sous les draps. Va-t-elle sortir le pic à glace ? Ou seulement hurler de plaisir ? On se retrouve plus intéresser par ce qui va se passer plutôt que sur ce qui se déroule sous nos yeux. Le tout servit par la fabuleuse bande originale de Jerry Goldsmith, qui titille au plus au point ce sentiment de suspense, sans jamais sombrer dans une ambiance érotique pesante qui aurait gâché l’ensemble. Bref, Basic Instinct ne nous ménage aucunement ! Le film se montrant pervers, dans tous les sens du terme !
Beaucoup de films se sont essayés dans ce genre qu’est le thriller érotique (Color of Night, Sliver…), sans jamais atteindre le niveau de qualité d’écriture et artistique de Basic Instinct. Un succès commercial et critique amplement mérité, qui se présente comme un bras d’honneur au cinéma américain hollywoodien, qui censure à tout bout de champ dans le but d’avoir un plus large public qui viendrait payer leur place. Et encore, avec Basic Instinct, on était encore à l’époque où Hollywood osait !