Retour du tandem d'abrutis exaltés après vingt ans au placard. En 1994, le succès de Dumb & Dumber donnait une impulsion décisive à Jim Carrey (dont l'ascension fulgurante s'est faite sur quelques mois) et révélait les frères Farelly. Ils allaient devenir des maîtres du potache, avec notamment Mary à tout prix, avant de se faire voler la vedette la décennie suivante par Judd Apatow et le gang de la Frat Pack. Dumb and Dumber to arrive donc après une série de comédies mineures voir insignifiantes pour les spectateurs, en remettant les mêmes acteurs en selle : Carrey et Jeff Daniels.
Les craintes légitimes sont balayées. Carrey n'a rien perdu de son énergie, comme ses performances récentes pour la télévision le démontraient ; elles avaient le tort de tourner à vide, ici elles sont coordonnées par une écriture malicieuse et intarissable. Lui et Jeff Daniels sont autrement drôles que dans le premier opus ; il n'y a plus cette espèce de pudeur avant d'aller au ridicule. Les personnages sont à la fois plus posés et bourrins, comme si leur maturité engendrait une certaine économie d'effets ajustée à un absolutisme de la connerie. Les crétins mirifiques ont bien dormis pendant vingt ans et peuvent épuiser leurs réserves sans vergogne ; toutefois le pourrissement n'est pas écarté.
Car si les copains super débiles ont le mérite de tout donner, l'ironie c'est qu'un autre happening si efficace semble raisonnablement exclu. Le dernier tiers baisse en vigueur et en drôlerie, à cause de recoupements d'intrigues étouffants. Les Farrelly ne réussissent pas à rendre attractives leurs nouvelles ressources humaines, Kathleen Turner étant la seule à nourrir la parade de Lloyd et Harry et apporter une nuance solide (l'évolution de son personnage pourrait être un reflet vulgaire de la sienne - elle jouait la femme fatale dans La fièvre au corps avant de grossir à cause d'une maladie). La séance est néanmoins une partie de plaisir, une rinçade joyeuse d'humour gras, éventuellement régressif ou inconvenant. Beaucoup d'énergie et une petite pointe de mélancolie au royaume des benêts hystériques. Les Farrelly ont eu leur sursaut mais, comme dans L'amour extra large où une grosse idée avait la fonction des cascades de numéros d'ici, leurs justifications plombent un peu l'ambiance.
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