Le thème est bien connu de la littérature fantastique, et toujours un peu excitant : un homme retrouve par hasard ( ?) son double et s’en trouve légitimement perturbé.
Chaque version du même individu ayant de son côté une compagne, l’une épouse enceinte de 6 mois, l’autre girlfriend un peu plus wild, les échanges promettent d’être amusant, d’autant que Villeneuve assume pleinement son penchant pour les jolies comédiennes (dont la frenchy Mélanie Laurent) faisant don de leur poitrine à l’audience.
Le parti pris de mise en scène est, lui aussi, bien rodé : à l’absence d’éclaircissements explicites par le langage, substituons un regard elliptique. Le cinéaste lorgne du côté d’Eyes Wide Shut dès le prologue, grand film sur l’impuissance et la médiocrité de l’imaginaire, pour ne cesser par la suite de pomper sans vergogne l’hypnose poisseuse du Lost Highway de Lynch.
Seulement voilà, instaurer une ambiance est une chose. Lui donner de l’épaisseur et une légitimité en est une autre
Le filtre jaune à outrance et les longues scènes muettes, les araignées dans le placard et sur la ville ou des visages en gros plan ne sont que des accessoires souvent poseurs pour un film qui repose finalement sur du vent. Car les béances du scénario ne renvoient pas au mystère insondable d’une psyché torturée (on aura tôt fait d’aller chercher des justifications du côté de la schizophrénie ou des contenus du cours inaugural, ou autre), mais bien à celles de l’inspiration. Les citations de Scorsese, mix maladroit entre Taxi Driver (le miroir) et Raging Bull (la réplique) sont au service d’une ébauche de conflit particulièrement déconcertante : échangeons nos compagnes et soldons nos comptes. C’est non seulement totalement improbable, mais ça contribue surtout à niveler vers le bas ce qui pouvait avoir d’éventuelles prétentions : tout cela ne serait que le prétexte à une banale histoire d’échangisme, d’où la boite à partouze du départ.
Fade, peu inspiré, prétentieux, Enemy offre certes à Gyllenhall un double rôle dans lequel il ne démérite pas, mais s’enlise dans les vapeurs jaunâtres qu’il essaie de nous faire passer pour un gage arty et cérébral.

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le 12 sept. 2014

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Sergent_Pepper

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