Les Gremlins contre Donald Trump.

J'avais reproché au 1er opus de ne pas trop savoir s'il était un film d'horreur ou une comédie, pour le second le ton est donné DÈS le premier plan du film avec l'arrivée de Daffy Duck et Bugs Bunny au point qu'on a l'impression quelques secondes qu'on est pas devant le bon film. Tout y et fois-ci : Cela va être une grosse comédie bien cartoonesque.

L'Immeuble fou fou fou

Du coup Joe Dante s'en donne à coeur joie. Visiblement, le temps entre les deux films (6 ans) lui a permis de trouver des tonnes de nouveaux gags à rajouter à cette suite ainsi qu'un autre cadre : fini la petite ville américaine, le film prend place dans un immeuble gigantesque à mi-chemin entre la laideur post-moderne (où toute "touche de fantaisie est interdite") et le bâtiment de science fiction. L'immeuble est une bizarrerie en soit servant à la fois de magasin, de bureau, de studio de télévision multi-chaine, et de laboratoire scientifique faisant des tests sur les animaux (et pas des petits...) Aucun architecte ou entrepreneur digne de ce nom ne se risquerait à un projet aussi bordélique, (surtout quand il demande de monter des girafes et des éléphants au 56e étage) mais cela fonctionne pour deux raisons :

1) Il est évident dans la tête du spectateur que le prétexte à l'accumulation de ces étages tous plus éclectiques les uns que les autres est la promesse d'y voir les gremlins se ruer à l'intérieur et y foutre le bordel. Et comme dans le film précédant, la première partie est un prétexte pour nous montrer le décors par petites touches, comme un enfant qui te montrerait toutes les finitions de son château de sable avant de l'exploser à grand coup de pied. Comme dans le premier film aussi, le chaos des gremlins est déjà en germe avant même leur arrivée effective : les portes-tambours fonctionnent mal, les écrans vidéos grésillent, les fontaines à eau tombent en panne, etc...

2) Il y a une dénonciation évidente du monde de l'entreprise et des multinationales avec un immeuble entièrement à la gloire de l'entrepreneur philanthrope, mélange de Ted Turner (le patron de CNN) et de Donald Trump. D'ailleurs avec la présidentielle de 2016, la référence m'a pété aux yeux là où autrefois j'étais complètement indifférent : Le mec est un chef d'entreprise, tout puissant, qui construit des immeubles, il a une égo sur-démesuré et se nomme D a N ie L cla MP. C'est avec Retour le Futur II, le second film d'adolescent de la même époque dont je m'aperçois après coup qu'il se foutait DÉJÀ de l'actuel candidat à la présidentielle des USA.

Après, contrairement à BttF II, la critique est moins marquée par le vitriol. Apparemment à cause de John Glover qui au lieu d'en faire un "evil corporate" comme marqué dans le scénario, il en fera plus une sorte d'homme-enfant, gentil avec ses employé et rêveur. Ça rend le personnage plus sympathique mais ça affaiblit un peu la charge, renvoyant le rôle du "connard" à son subalterne (qui finira...

La comédie, correction du premier film :

Du reste, le film est très drôle et toujours jouissif à voir. On sent que Joe Dante a bien remis son sujet sur les voies de la comédie , quitte même à parodier des éléments du premier film ou à expliquer que les morts de celui-ci ne l'ont jamais été. Le film voit le retour de Murray Futterman, le sympathique raciste (sic) et je me demande si son incursion dans le scénario n'est pas lié au fait que Hoyt Haxxon ne soit pas disponible ou un truc du genre. (Non, c'est vrai, la logique voudrait que les parents de Billy reviennent leur faire coucou et pas un personnage d'arrière plan sensé être mort.)

Outre les inévitables clins d'oeils et extraits de films en tout genre, cette fois-ci Dante ne va pas hésiter plusieurs fois à briser le 4eme mur. Les gremlins vont attaquer tour à tour, des scientifiques sceptiques des trois règles à respecter, un critique de cinéma (joué par un vrai critique qui avait détesté le premier film) et finissent par s'en prendre au film lui-même. Joe Dante fait même en sorte de pousser le délire jusqu'à changer ce passage dans les versions télé/VHS dans un cas très rare de jeu avec les médiums.

Le film en profite pour bien plus individualiser les gremlins : Dans le premier ceux-ci étaient uniforme à l'exception de "celui-avec-la-crête". Dans celui-là, non seulement les mogwais semblent avoir une identité distincte (avec un mogwai fou) qu'ils gardent une fois devenu des gremlins, mais en plus avec le délire chimique, l'équipe se met à faire muter les gremlins : gremlin-volant, gremlin-araigné, gremlin-électrique sans oublié les deux plus marquant : le gremlin-trans et le gremlin intello. Le fait qu'en 5 ans, les techniques d'animatroniques soient de plus en plus poussées a bien aidé le projet, Gizmo gagne même en mouvement.

Autre correction du premier film : les personnages sont bien mieux plantés, sans doute parce qu'ils n'étaient pas esquissés à la base pour être de la potentielle "viande-à-boucherie" de film d'horreur et plus taillés pour la comédie. Si les nouveaux personnages ont des caractéristiques propres, les personnages de Billy et de sa copine prennent en épaisseur. Billy notamment, qui se dote d'un caractère bien plus marquant, tente de gérer les différents personnages à travers le chaos et trouve L'IDÉE GÉNIALE qui va résoudre le film !

Le problème de la comédie :

Dans mon souvenir Gremlins 2 était meilleur que le premier, et je préfère son délire comique bien assumé aux passages horrifiques (quoique réussi) du premier. Toutefois je me suis retrouvé avec un goût d'inachevé à la fin du film. Avec le "tout comédie" toute tension propre au film d'horreur disparait. J'en veux ce passage où les jeunes filles se retrouvent dans une toile face au gremlin-araignée.

Là où le premier tentait de mettre du poil à gratter dans la société américaine avec une morale certes bancale mais qui se voulait impertinente et en pied de nez, le second se finit avec le chef d'entreprise reprenant en main son immeuble et tout le monde rentrant à la maison.

Au final, le passage des gremlins dans l'immeuble de Clamp n'aura été qu'un incident isolé, Billy et sa fiancée seront content de revenir au boulot le lendemain. Clamp va juste arrêter de construire des immeubles pour construire des petites villes (vous savez, celles dont on démontrait qu'ELLES NE FONCTIONNAIENT PAS dans le premier) ses activités aussi inhumaines et mal branlées soit-elles vont continuer car personne ne s'est remis en question. Mais ça, le film s'en fout, il termine juste sur une pirouette avec Gizmo qui veut HBO.

Et pour le coup, je regrette peut-être le côté horrifique : dans les films d'horreur les victimes ne recommencent plus leurs conneries... vu qu'elles sont mortes !

Deux points supplémentaires :

Oui, j'avais deux trucs à dire mais j'ai pas réussi à le caser dans le discours.

1) Un Gremlins 3 est apparemment en production et prévu pour 2017. Après avoir revu les deux films j'en attends beaucoup : j'espère qu'ils vont garder les marionnettes animatroniques et que les gremlins ne seront pas (trop) en CGI ! J'espère aussi que contrairement à la mode en ce moment, il s'agira d'une véritable suite et non d'un remake déguisé, à l'instar du Star Wars VII ou de Ghostbuster de 2016. Il y a vachement de choses qu'on peut encore inventer avec les gremlins et les mogwais (par exemple : que se passerait-il s'il y avait un autre mogwai "gentil" autre que Gizmo, ceux-ci vieillissent-ils ? ) et de nouvelles thématiques à explorer ! Du coup, on croise les doigts.

2) Visionnage avec ma copine oblige, j'ai revu les deux film en VF. Et entre le 1er et le 2eme, Billy change de doubleur pour avoir la voix de Luc Hamett. Le second film étant sortie en 1990 et étant résolument comique, les directeurs de casting ont décidés de donner à Billy la même voix française que celle de Marty Mc Fly, histoire de créer une sorte de lien dans la tête du spectateur.

Alors, oui, ça doit faire bander pas mal de fans-de-vf pour lesquels Hammet c'est une sorte "d'icône de notre enfance" tandis que moi je trouve le procédé compréhensible mais symptomatique de l'irrespect de cette bande de marchand-de-caca que sont les directeurs de casting VF.

Les mêmes qui te racontent, la main sur le coeur qu'ils font tout pour trouver des doubleurs qui "collent au timbre de voix" ou à la façon de parler d'un acteur, n'en ont résolument rien à foutre. Si c'est un film d'horreur ou une comédie ils n'hésiteront pas à changer de doubleur, histoire d'indiquer au spectateur français, trop con pour la subtilité sans doute, quel type de film il est en train de regarder.

Quand je pense qu'il existe encore des cons pour me seriner sur le net que "les VF des films américains dans les années 90 étaient bien meilleures que les V.O." ... ça me donnerait limite des pulsions violentes.