--- Bonsoir, voyageur égaré. Te voila arrivé sur une critique un peu particulière: celle-ci s'inscrit dans une étrange série mi-critique, mi-narrative, mi-expérience. Plus précisément, tu es là au cinquième épisode de la sixième saison. Si tu veux reprendre la série à sa saison 1, le sommaire est ici :
https://www.senscritique.com/liste/Vampire_s_new_groove/1407163
Et si tu préfère juste le sommaire de la saison en cours, il est là :
https://www.senscritique.com/liste/The_Invisibles/2413896
Et si tu ne veux rien de tout ça, je m'excuse pour les parties narratives de cette critique qui te sembleront bien inutiles...---
Puisque mon amie m’a donnée cette adresse, prenant un immense risque au nom de notre amitié, il m’incombe de ne pas réagir de manière égoïste et précipitée. Il serait effectivement de mauvaise ton si on me découvrait me rendant à ce mystérieux endroit quelques heures après avoir fréquenté, malgré l’interdiction de la communauté, une sorcière trublionne et insolente. Le meilleur moyen que j’ai pour l’heure de faire avancer mes recherches, c’est de continuer d’explorer le cinéma, et de m’armer pour le reste de patience. Pour contrebalancer cet ennui, je me suis offert le bonbon de découvrir enfin le film que j’attendais plus que tous les autres. Car aucun pilier du succès de Universal Monsters ne pourra atteindre dans l’échelle du désir fébrile de le découvrir, un film qui s’intitule *L’agent invisible contre la Gestapo* (*L’agent Invisible*, plus sobrement dans sa version courte, mais le titre complet est si délicieux que je n’utiliserai que celui-ci ici). Avec le même enthousiasme puérile que si j’avais attendu une *Attaque de la Moussaka Géante*, ou un *Sharknado*, je trépignais littéralement d’impatience de découvrir ce titre, annonce formelle -pensais-je-, d’un abandon total de la part du studio, d’un navet gras, où le désir de piéger à nouveau un public méprisable puisque friand de ce ringard d’homme invisible surpasse toute once de respect qu’on puisse vouloir témoigner audit public en lui livrant un film, si ce n’est de qualité, au moins crédible. Pour résumer cette incompréhensible phrase : je m’attendais à un nanar. Mais sur ce coup là, j’avais manqué de logique et de sens du détail.
Car oui, un détail m’ayant échappé m’a sauté aux yeux dès le début du film, et m’a forcé à reconsidérer mes attentes quant à *l’Homme Invisible contre la Gestapo*. Sa date : 1942. Moins d’un an après Pearl Harbor, en pleine seconde guerre mondial. Les nazis, c’est pas pour rire. Je ne comprendrai donc probablement jamais d’où sort ce film, et cette idée saugrenue d’allier une actualité brulante et tragique avec un monstre Hollywoodien à succès, et certainement pas le plus crédible de la clique Universal qui plus est. Résulte de cette anomalie curieuse un film le cul entre deux chaises, cherchant à être sérieux sans trop oser l’être, cherchant à être drôle sans vraiment s’assumer non plus. Un film pas réellement raté, mais pas non plus vraiment réussi. Un film qu’on aura oublié après-demain. De ce genre de film dont il n’y a rien à dire. C’est patriotique et raciste ; divertissant et incohérent ; amusant et affligeant. Même diégétiquement, tout s’annule dans un grand écart spectaculaire entre le film d’actualité et le film fantastique. Le don d’invisibilité est donné à l’homme le moins discret du monde, rendant son pouvoir absolument inutile ; la fin est un sinistre carambolage entre la résolution d’une affaire de double-identité assez complexe et un Deus Ex Machina honteux et aussi bien dissimulé que l’agent invisible quand il ouvre une porte devant pas moins de quatre paires d’yeux attentives et suspicieuses.
Je ne suis pourtant pas particulièrement fan de nanar, trop respectueuse que je suis de l’acte de bravoure immense qu’est celui de faire un film, mais dans cette situation là, j’aurai préféré un film volontairement raté et affligeant de bêtise, plutôt que ce film maladroit et indécis, vomissant sans le vouloir au visage du spectateur sa gêne de devoir essayer de faire du sérieux avec un matériau de base qui n’arrive toujours pas à l’être.