Après trois films aux succès modérés, Gérard Oury suit le conseil de Louis de Funès et se lance dans la comédie. Au milieu des années 1960, il enchaîne rapidement Le Corniaud et La Grande Vadrouille. Portés par le tandem Bourvil/De Funès, ces deux films connaissent une carrière exceptionnelle. Le premier passe les 10 millions d'entrées, le second décroche le record français (maintenu jusqu'à Titanic 32 ans plus tard).
Dans Le Corniaud, De Funès/Saroyan trouve en Bourvil/Maréchal le parfait pigeon, le 'bon corniaud' pour ses affaires (faire passer un colis sous le nez des douaniers). Trop corniaud peut-être : le brave benêt attire l'attention et fonce dans toutes les chausses-trappes avec un sourire bonhomme. Comme De Funès le suit pour surveiller la mission, il se trouve empêtré dans un tas de périls et de quiproquos, à devoir contrôler, guider, sauver son commis abruti en prenant soin de ne jamais se faire reconnaître.
Le début est prometteur, la manière dont Bourvil est utilisé étant jubilatoire, l'innocence et la crétinerie du type assez merveilleuses. L'ensemble n'est pas à la hauteur, la course avance avec pesanteur. L'idylle aplatit le rythme, en plus d'être hautement improbable – bien plus que les péripéties abracadabrantesques. Les séquences folklo sont perchées çà et là pour réveiller le chaland. Les opus ultérieurs signés Oury auront parfois encore ce défaut de liant (Le Cerveau) et toujours cette manie de vouloir faire durer le plaisir (Rabbi Jacob).
Le Corniaud n'étant pas une comédie sous amphétamines comme La Folie des grandeurs, le résultat est mitigé. Au moins ce Corniaud installe clairement le style Oury, annonce son goût pour le destroy tranquille (culminant dans le tardif et mal-aimé La soif de l'or). Les voitures sont l'outil fétiche : accidents, usages 'décalés', véhicules improbables se succèdent. D'ailleurs pour s'embarquer dans cette histoire, De Funès percute Bourvil, dont l'engin part carrément en lambeaux. Dans Crash de Ballard (1973), Oury pourrait jouer le tonton comique.
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