Avant le Kinétographe de Dickson/Edison (Le Salut de Dickson en 1891) et le cinématographe des Lumière (Sortie de l'usine en 1895), Augustin Le Prince tourne des embryons de films avec son propre appareil, qu'il baptisera le MK2. Si Man Walking Around the Corner (1887) et Le joueur d'accordéon (1888) n'ont à peu près pour intérêt que d'exister, Une scène au jardin de Roundhay et Le pont de Leeds (1888 tous les deux) sont à retenir comme des opus significatifs de l'Histoire du cinéma.
Le premier capture quelques secondes en famille sur la propriété des beaux-parents du réalisateur, le second offre une vue sur l'action dans la rue. Animée depuis, la série d'image consiste alors en deux secondes d'instants 'volés' à ces gens (piétons ou en calèche) en train de circuler sur le pont de Leeds (ville du Yorkshire). Les films de Le Prince n'ont pas de vocation scientifique ou simplement informative, contrairement à Muybridge (Sallie Gardner at a Gallop, La chienne Maggie). Sur ce plan cette contribution serait donc inférieur, au moins dans ses intentions.
Par contre elle présente bien un intérêt documentaire pour le spectateur, en particulier dans le cas du Pont de Leeds qui montre un petit échantillon de population de l'époque. Cela en fait la plus vieille vidéo où des gens sont en mouvement dans leur état naturel. La révolution la plus profonde et 'intime' portée par la photographie et le cinéma est probablement celle-là : pouvoir représenter ou être représenté en direct, même animé dans le cas du cinéma. La peinture ou le dessin seront bientôt dépassés et c'est ce Pont de Leeds qui pose la première pierre.
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