Perfect Blue
7.8
Perfect Blue

Long-métrage d'animation de Satoshi Kon (1997)

Perfect Blue commence sous les ors du spectacle, la pop japonaise et ses codes si spécifiques : habillées comme des poupées, à la fois petites filles et objets de tous les fantasmes grâce à un costume suggestif, les jeunes chanteuses s’adressent à un public essentiellement masculin, consommateur et lucide. Mais la machine fonctionne et les désirs sont stimulés.
Un choix du cadrage permet de voir, subrepticement, un fan tenir dans la main une des danseuses : les bases du thriller sont posées.
Polar de son temps, où le harcèlement passe par un média nouveau-né, internet, Perfect Blue se double d’un récit labyrinthique sur les dérives d’une psyché malade face à dialectique des personnalités publiques et privées.
Chaque séquence permet d’établir des conclusions sur la trame centrale, à savoir une série de meurtres sauvages, mais se révèle presque à chaque fois appartenir à une fiction mise en abyme : par le biais d’un tournage, ou d’un rêve, voire d’une hallucination. Le temps se répète, les personnes se dédoublent, et la réalité qu’on a pris pour telle au départ se dérobe.
Fascinant dans son rythme, syncopé entre des temps morts contemplatifs et des séquences d’une rare violence, entre l’introspection intime et l’épanouissement malsain d’une star offrant son corps en pâture à la foule, le récit malmène le spectateur qui se perd avec la protagoniste dans les fluctuations des projections mentales et des rôles qu’elle joue… ou qu’on lui impose.
Hitchcock, mais surtout son disciple De Palma et quelques vertiges de Lynch planent sur l’atmosphère délicieusement perturbante de ce film. Petite poupée docile, Mima n’est qu’un fantasme qui s’interroge sur sa nature et son libre arbitre, et renvoie au spectateur la morbidité de ses propres fantasmes, de son sadisme et son désir toujours plus grand d’être surpris.
Une belle réussite.
Sergent_Pepper
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Psychologique, Adolescence, Erotisme, Violence et Thriller

Créée

le 27 mars 2014

Modifiée

le 27 mars 2014

Critique lue 7.8K fois

176 j'aime

24 commentaires

Sergent_Pepper

Écrit par

Critique lue 7.8K fois

176
24

D'autres avis sur Perfect Blue

Perfect Blue
Sergent_Pepper
8

Harcèle-moi si tu veux

Perfect Blue commence sous les ors du spectacle, la pop japonaise et ses codes si spécifiques : habillées comme des poupées, à la fois petites filles et objets de tous les fantasmes grâce à un...

le 27 mars 2014

176 j'aime

24

Perfect Blue
Strangelove
8

L'école des fans

Satoshi Kon, épisode 2. Après être rentré dans son univers de taré avec son film Paprika (que je recommande chaudement), me voilà déjà lancé dans son premier film, Perfect Blue, qui suit les déboires...

le 11 nov. 2013

84 j'aime

5

Perfect Blue
Velvetman
9

Body double

Premier film de Satoshi Kon, Perfect Blue est un coup de maitre salvateur incarnant les déboires schizophréniques d’une artiste s’enfermant dans une paranoïa destructrice. Mima, belle et jeune...

le 20 janv. 2016

70 j'aime

6

Du même critique

Lucy
Sergent_Pepper
1

Les arcanes du blockbuster, chapitre 12.

Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...

le 6 déc. 2014

774 j'aime

107

Once Upon a Time... in Hollywood
Sergent_Pepper
9

To leave and try in L.A.

Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...

le 14 août 2019

715 j'aime

55

Her
Sergent_Pepper
8

Vestiges de l’amour

La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...

le 30 mars 2014

618 j'aime

53