Je t'aime, je te tue ...ta flore intestinale

(texte avec spoil; premières remarques)


Un film passionnant et très beau sur la forme au sujet d'un couple d'amoureux dont le choix de mode d'expression de leur amour m'a hélas détaché du film.


Je connaissais Stan de South Park si amoureux de Wendy qu'il en vomit dés qu'elle lui parle… sans doute de la nausée non maitrisée...dés qu'elle lui parle, mais aussi dés qu'il la voit.


Je connaissais Simon Jérémi/Dominique Farrugia et ses vomis joyeux dans La cité de la peur.
Mais je ne connaissais pas: "quand je suis contente, je te fais vomir".
Pour se rendre indispensable et aussi "le faire revivre" disent certains sur SC, une amoureuse empoisonne son amoureux:



"Je t'aime, je te tue ; je ne t'aime plus, je te tue encore ; tu ne m'aimes plus, je te tue toujours ; tu l'aimes, je te tue passionnément; il t'aime, je le tue à la folie ! 2 000 à 2 300 homicides commis chaque année en France (plus de six par jour). Morgan Sportes en avait listé parmi les moins sensationnalises, les plus simples, les plus rudimentaires — assassinats d'amateurs".
dans son livre "Je t'aime, je te tue"



Maintenant que je sais qu'il ne meurt pas, j'en aimerai mieux les prochains visionnages.
Prochain visionnage car sur la forme, le film est d'un rare plaisir: visuel, auditif et d'admiration des acteurs même si Lesley Manville (la soeur) est encore un peu sous-utilisée par rapport à son talent si varié. Ses surprenantes apparitions dans le film marquent.


Le réalisateur Paul Thomas Anderson rejoint son personnage de couturier dans l'amour du travail et la passion des détails; entre autres, on trouve de beaux gros plans:
___sur dé à coudre
___sur une goutte sur la bouche en cul-de-poule d'une théière...même type de bouche que porte l'excellente Julia Davis, hélas non listée au casting sur SC dans un court rôle mais essentiel, Lady Baltimore, qui se moque du bébé cadum/bambin "étranger" et pas de sa classe sociale que son ami couturier a voulu épouser. Quand Vicky Krieps quitte la table de Backgammon où elle s'ennuie, Lady Baltimore envisage qu'elle est partie



"voler ou tuer des gens...comme ses ancêtres".



___gros plan aussi sur un autre dé encore plus petit où elle verse le poison
___sur les 'jupons' des champignons: où on réalise que la nature s'habille de robes très variées et de froufrous inspirant les créateurs et les rendant , on espère, humbles.


Même les vitraux sont beaux.


Quant à Daniel Day-Lewis, il est quasiment un sorcier hypnotiseur dans son art de devenir un personnage. Il n'y a pas eu une seconde où j'ai pensé à l'acteur, je n'ai vu et entendu que le personnage.


Je ne suis pas fan de Sade donc je n'ai pas compris leur relation vers la fin...la scène où il lève les yeux de son travail de couture et la voit "cuisiner", il sait/devine le poison, il mange quand même, il est malade, il survit, ils s'aiment…???
(Je me demande si le film aurait été autant aimé si ses personnages avaient vécu dans une caravane au lieu du centre de Londres et l'amoureuse rendait malade volontairement son amour)
Anne Schneider m'éclaire et m'explique en parlant très justement" d'un retour à la vie", il est enfermé dans ses habitudes et craintes et elle tente de le libérer.
Sauf que c'est par la douleur et une forme de S&M dont je ne suis pas fan et encore moins de sa publicité.
Bien sûr, il aurait été peut-être cliché et banal qu'ils se tiennent par la main et marchent dans un de mes parcs à feuilles mortes à la "Harry rencontre Sally", mais de là à les filmer, à la place, se tenant toujours les mains et se regardant avec amour, MAIS aux toilettes, assis sur le siège, une bassine de vomis sur les genoux...je trouve que c'est moins délicat, or le film sur sa forme est très délicat.
[J'aime bien aussi l'expression juste de Camden qui parle



"de love story déglinguée".]15



Boubakar me rappelle le nom du responsable de la bande-originale que j'ai aussi aimée: Jonny Greenwood dont j'avais déjà tant aimé celle de There will be blood.
Et Eric Pokespagne me fait découvrir une piquante référence: la Maison de Bernarda Alba de Federico García Lorca ...ses personnages restant cloîtrés aussi.


Ma plus grosse surprise reste leur réaction au mariage de leur riche sponsor où ils sont forcés de venir:



(tu n'as pas le choix) "Elle paye pour la maison" (le loyer) rappelle Cyril, la soeur à son frère; elle profite aussi de cette mécène/Etat-Providence qui les entretient.



Cette riche mécène est extrêmement émouvante; une des plus tristes mariées du cinéma: en pleurs et détresse dés l'essayage de la robe Excellente Harriet Sansom Harris,non listée au casting sur SC (comme Julia Davies); elle jouait la démente et si drôle agent démoniaque de Frasier
Mais alors que j'étais au prise de sa tristesse, les deux ne sont qu'au prise de l'agacement ...même la couturière, et c'est sans doute là qu'ils commencent à s'aimer, car elle ne pense qu' à la santé de la robe, pas de celle qui la porte, comme lui.
Je m'attendais à ce qu'ils s'inquiètent pour la mariée...non, seulement, la robe leur fait du soucis...la passion de la maison Woodcock les unit.

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le 17 avr. 2019

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