BIENVENUE AU VILLAGE DU MATIN CALME

C'est les yeux embués de larmes que j'entrepends cette critique, encore tout ému par ce film frais, beau et émouvant, porté par la musique magnifique de Joe Hisaishi. Le cinéma du Pays du Matin Calme n'en finit pas de me surprendre ! Si l'on excepte quelques maladresses, comme par exemple des trucages numériques pas toujours parfaits (voir la scène du sanglier) et un scénario que certains esprits chagrins jugeront plein de bon sentiments, "Welcome to Dongmakgol" est un film qui "donne la patate", un peu comme "Castaway on the Moon" - autre film coréen - ou "Le fabuleux destin d'Amélie Poulain".
L'histoire débute en octobre 1950, alors que les Américains viennent de débarquer en Corée pour appuyer l'armée du Sud, bousculée par les Communistes. Un aviateur américain abattu, puis trois Nord-Coréens en déroute et deux Sud-Coréens égarés, se retrouvent tous à Dongmakgol, un petit village paisible perdu au milieu des montagnes. Les naïfs villageois découvrent alors un conflit dont ils ne soupçonnaient même pas l'existence. Leur havre de paix sera-t-il rattrapé par la guerre ?
C'est un film profondément antimilitariste et plein d'optimisme. Derrière les uniformes se cachent des hommes identiques en tout point, animés par les mêmes rêves (voir la scène de l'abandon des tenues militaires). N'oublions pas que la Corée est coupée en deux, séparée depuis plus de 60 ans par un mur de haine et une frontière infranchissable. Le réalisateur, Kwang-Hyun Park, nous montre à travers ce film toute l'absurdité de deux pays frères qui se tournent le dos. Le jeune infirmier sud-coréen ne demande-t-il pas au vieux soldat communiste s'il peut l'appeler "Grand frère" ? Et Kwang-Hyun Park fait dire à l'un des soldats, qu'ils "forment une force unie Nord-Sud". Un doux rêve, puisqu'autour d'eux, le Nord et le Sud s'entredéchirent, en proie à une folie meurtrière.
Cette folie (guerrière) s'oppose à l'Innocence, incarnée à l'écran par la simple d'esprit Yeo-il, qui symbolise la pureté perdue de la Corée. Cette folie - idéologique (le Communisme) - s'oppose également à la Sagesse, représentée par l'ancien du village, qui explique qu'il n'y a pas besoin d'élever la voix pour commander et que l'on dirige bien quand les ventres sont pleins (critique sous-jacente de la manière dont la famille Kim gouverne la Corée du Nord).
Bref, dans ce film porteur d'espoir, c'est l'Innocence de tout un peuple qu'on assassine. Un peuple qui n'aspire qu'à retrouver son unité. Un paradis perdu empreint de nostalgie, qui, aux yeux de Kwang-Hyun Park, ressemble à s'y méprendre à Dongmakgol... A VOIR ABSOLUMENT.