Après avoir revécu son adolescence dans l’émouvant Camille redouble, Noémie Lvovsky revisite son enfance, et plus particulièrement la relation fusionnelle qui la liait (avec toute l’ambiguïté que le terme charrie) à sa mère, excentrique hypersensible que la société jugeait folle et dans laquelle elle voyait plutôt une admirable « mystique laïque ». Elle nous entraîne en effet dans l’univers de Mathilde (Luce Rodriguez), petite fille de neuf ans qui vit seule avec sa maman en complet décalage avec la réalité (qu’elle interprète elle-même) dont elle essaie de prendre soin au mieux pour retarder au maximum son placement en institution. Dans le monde de Mathilde, les squelettes sont vivants, les animaux parlants, et l’amour dansant.
Malgré le potentiel mélodramatique de son sujet, Noémie Lvovsky ne se complaît aucunement dans la noirceur. Aux larmes et à la mélancolie, elle préfère les couleurs et la fantaisie. Grâce à l’imagination en effet, la réalisatrice qu’elle est devenue, à l’instar de la petite fille qu’elle a été, possède le pouvoir de subvertir la brutalité du réel en lui opposant la poésie du monde qu’elle s’invente. Lumineusement poignant.