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Qui n'a pas eu un seul instant l'aspiration narcissique d'une célébrité éphémère ? Trouver le reflet d'une réussite dans le reflet des yeux des autres pour pouvoir enfin se dire que ça y est : j'ai accomplis quelque chose d'important ?
Un sentiment humain, sûrement, comme l'illustre le cinquantenaire Paul Matthews, Professeur doctorant (en zoologie ?) dont la quiétude se résume à se battre contre une nature qui n'est pas la sienne : vouloir la lumière, une notoriété inaccessible pour faire reconnaître son travail au plus grand nombre.
Porté par un Nicolas Cage hors du temps, notre protagoniste se retrouve propulsé au rôle de la personne la plus populaire au monde grâce à un phénomène mystérieux : apparaître dans le rêve de toutes et tous. Du jour au lendemain et dans un costume 2 pièces de Freddy Krueger sous xanax, Paul devient l'objet de tous les fantasmes. Du rêve au cauchemar, tout se bouscule rapidement pour notre héro, d'ami à ennemi public numéro 1.
Après Sick Of Myself, Borgli continue son aventure cinématographique avec des propos qui ne cesse de sonder les relations humaines et notre rapport à l'autre. Sous ses airs de cours magistral de philosophie du rêve, le réalisateur interroge avec une justesse contemporaine la notion de popularité dans un monde mécaniquement structuré par le marketing et l'apparaitre médiatique. Une dynamique dans laquelle Paul se piège lui même, en acceptant de rentrer dans le jeu de la tendance, quitte à se perdre et s'oublier.
Paul n'est qu'une pièce maîtresse d'un grand zoo humain, en proie à des réactions les plus primaires, guidées par la force des émotions qui restent de leurs rêves/cauchemars. Analogie intéressante d'ailleurs avec son métier, dans lequel il étudie la capacité des proies à se dissimuler des prédateurs dans la savane.
Dream Scénario est un libre patchwork d'inspirations qui ne cesse de nous faire penser à des oeuvres plus ou moins récentes : "Beau is Afraid" d'Ari Aster et de la même Maison A24, le français "Vincent doit mourir" de Stephan Castang, ou directement "Les Griffes de la nuit", dont le réalisateur ne se cache pas d'avoir reprit la structure, pour y placer en son sein l'histoire d'un Monsieur Tout le monde, plutôt amateur de gaufres au sucre que de griffes en acier.
Une esthétique brillante, une musique éclairante, un casting qui mérite l'éloge (Julianne Nicholson, Michael Cera...) : Borgli marque à grand coup de Freud Punch cette fin d'année, en travaillant un récit qui nous raconte la dangerosité de l'extraordinaire et la fragilité de la réalité.
Mention spéciale à un Nicolas Cage qui crève l'écran. Un vrai travail de composition et de justesse face à l'ampleur déconcertante des péripéties du film.
Bref, un coup de coeur pour cette fin d'année.
Créée
le 7 déc. 2023
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