Ce film de Takashi Miike (réalisateur très prolifique : quatre à cinq films par an environ) est un véritable OVNI, qui, de prime abord, semble n'avoir ni queue ni tête. En effet, que dire de cet embrouillamini d'images de toutes formes, de tous aspects et de toutes origines (on remarquera l'usage d'images d'archives de la deuxième guerre mondiale, notamment) ? Dès le départ, l'incompréhension règne en maître : sur un fond noir, un schéma animé dessiné au trait blanc nous montre un pénis incapable d'avoir une érection. Ce schéma s'accompagne d'un message : « Canal Déférent ». Le ton est donné : ce film étrange et violent à tout point de vue va nous parler de problèmes engendrés (c'est le cas de le dire !) par l'impuissance de l'Homme à gérer ses désirs... Le résultat ? Des guerres à gogo, des meurtres à n'en plus finir, des crimes contre l'Humanité saupoudrés d'histoires de haines et de vengeances absurdes.
Il faut le souligner, rarement un film aura été aussi loin dans la démonstration de l'absurdité totale de la violence dont est capable l'homme sur l'homme. Le début de l'histoire se déroule en 1865. Le personnage principal, Izo, est un samouraï qui se fait salement crucifier au début du métrage. Ressuscitant illico à notre époque, il n'aura de cesse de se venger des descendants de ses bourreaux, qui sont tous devenus hommes de pouvoir : hommes politiques, général de l'armée japonaise, grands financiers, etc. La trame narrative est très simple : Izo les retrouve et les zigouille tous. Cependant, rien à voir avec un film de Bruce Lee en un peu plus sanglant. Ce qui apparaît en filigrane est une critique d'absolument toutes nos institutions. En effet, Izo se confronte à des policiers, des militaires, des dignitaires religieux, des actionnaires, des ministres... Mais plus il s'acharne à vaincre ces institutions présentées ici comme totalitaires, plus il devient lui-même un monstre et un dictateur. Au final, ce film nous montre à quel point il est strictement impossible de changer le monde, quand bien même toutes les crapules qui le dirigent viendraient à disparaître. Takashi Miike préconise plutôt comme philosophie, lors de la dernière bobine, la phrase suivante : « Toi... comment as-tu vécu ta vie et qu'as-tu vu ? »
(critique parue dans le mensuel Le Poiscaille - juin 2010)
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