Je suis allé voir L'attachement à reculons. La faute à une bande annonce démonstrative qui en dit trop et pouvait laisser supposer un mièvre exercice lacrymal opérant sur le registre du deuil et de l'attachement (comme le titre du film l'indique au demeurant) avec, au surplus, un enfant acteur adorable utilisé comme attrape-mouche pour mamans.
Je dois dire que je me suis assez lourdement trompé. Par sur le thème du deuil et de l'attachement, ni même sur le lacrymal. Il y aura effectivement de cela dans le film. L'amorce du film est parfaitement résumée dans la bande annonce et s'avère effectivement un peu démonstrative, mais beaucoup moins qu'on aurait pu le craindre. Mais surtout, une fois le décor posé, j'ai été très agréablement surpris par cette œuvre qui fourmille de réflexions profondes et justes sur la résilience, la filiation et les ressorts complexes de l'affection. Si le film ne cherche pas à éviter les larmes, il ne cherche en aucun cas à en faire un argument de vente. Bien au contraire, et le film évite ainsi, consciencieusement, l'écueil de la mièvrerie.
Plus encore, la mise en scène est impeccable et les dialogues sont superbement écrits et d'une très grande subtilité. Le quatuor d'adultes (Bruni-Tedeschi, Marmaï, Pons et Quenard) exécute une partition sans fausse note, tout en retenue et, cerise sur la gâteau, qui ne tombe à aucun moment dans les clichés. C'est d'ailleurs l'immense réussite du film. Tous sont pétris de contradictions, d'ambiguïtés, et se bercent d'illusions. Et en définitive profondément humains et admirables de justesse. Valéria Bruni-Teschi effectue une prestation de haut vol qui m'a fait penser à son sublime personnage de Ceux qui m'aiment prendront le train. Une fragilité à l'état brut enveloppée dans une fausse carapace de femme indépendante. C'est dans ce registre qu'elle nous rappelle à quel point c'est une très grande actrice, pour peu qu'elle nous laisse tranquille avec ses névroses de fille de milliardaire mal aimée.
Quant à l'enfant (César Botti), il effectue une très belle prestation, très touchante, même si l'on aimerait voir autre chose que des petits singes savants HPI à l'écran. Mais la force du film est justement de décentrer la caméra du jeune protagoniste pour mieux nous montrer les adultes se dépatouiller avec leurs drames intimes, leurs doutes et leurs limites. Pour, en définitive, retrouver le chemin de la vie.
L'attachement est vraiment un beau film, très sincère et touchant, qui nous nous amène à réfléchir sur les multiples facettes de l'amour filial et sur la possibilité (ou l'impossibilité c'est selon) d'aimer à nouveau lorsque l'on n'a pas fait son deuil. Carine Tardieu nous propose en creux une réflexion très fine sur la capacité de décentrement et sur les illusions amoureuses. Bref, un film d'une grande intelligence, excellemment interprété et qui donne matière à méditer. A découvrir !