J'ai assisté à l'avant première au studio Galande de ce film. Le réalisateur ayant conseillé de ne pas essayer de comprendre mais de se laisser porter, j'ai été happée dans une plongée dans les profondeurs de la psyché humaine, à travers celle du personnage de l'écrivain, la mienne en miroir.. Le début d'une lenteur bienvenue donne la couleur du film: la caméra tourne autour de l'écrivain, on entend sa voix, la voix du réalisateur qui tourne le film, on est déjà dans le vertige , qui observe qui, qui est le sujet et qui est l'objet et de quel regard? Le temps , la salle n'existaient plus, j'étais conduite à pénétrer dans la forêt profonde de l'inconnu qu'on découvre des personnages, certes mais aussi et surtout de soi- même , dans une expérience sensorielle vaste, grâce aux images d'une beauté puissante et grâce à la bande son qui est un film en soi, aussi important que l'image, que ce soit par les bruitages, la musique, les voix de femme avec cette langue arabe intense, âpre et mélodieuse en même temps..
Le réalisateur ose parler de notre monde dans ses grandes questions en souffrance: écologique, les migrants , l'islam,le désir, mais le terme parler n'est pas juste car il donne à ressentir, notamment ce qu'est le désir, ce que peut être le sexe; la scène centrale est superbe, enfin, on montre ce que peut être l'union des corps . A partir de ce moment de bascule, le film s'intensifie encore, les textes sont d'une force et d'une beauté donnant à réfléchir.. A ce titre ce film est éminemment politique..Il dit et montre clairement et simplement ce qui n'est jamais réellement dit. Ca fait du bien une vraie parole et je suis sortie de ce film très détendue.
Les acteurs ne jouent pas, ils se donnent ; même le tressage avec des "non-acteurs" dans la rue est bouleversant, où est la réalité, où est la fiction?
Difficile de parler d'un film en quelques lignes surtout que j'ai besoin de le revoir, je n'en ai vu assurément que quelques couches et je ne suis pas sûre de revoir le même film la prochaine fois..
Ce film ne peut laisser indifférent , en témoigne le nombre de spectateurs qui sont restés longtemps à discuter sur le trottoir à la fin!
Il ne répond pas aux codes habituels du cinéma mais j'espère que son public le trouvera car il est d'utilité publique en cette période d'uniformisation forcenée!