Là-haut
7.5
Là-haut

Long-métrage d'animation de Pete Docter et Bob Peterson (2009)

Là-Haut fait partie de tous ces films d'animation que j'ai regardé plein de fois étant enfant mais dont je n'ai presque plus de souvenirs. Par hasard, il y a quelques temps, j'avais eu l'occasion de parler du film lors d'un exposé sur le montage, ce qui m'a donné envie de le revoir


Le film commence dans une salle de cinéma, où un petit garçon découvre les exploits de Charles Muntz, un explorateur qui part explorer une vallée perdue en Amérique du Sud. Obsédé par son idole et les grands espaces, le petit Carl Fredricksen se rêve en explorateur et rencontre Ellie, une petite fille tête brûlée qui deviendra sa femme. Le temps passe, le petit couple vit une vie tranquille avec ses hauts et ses bas, mais malheureusement, Ellie meurt avant son mari, laissant le vieil homme tout seul. Seul dans sa petite maison colorée au milieu d'immeubles qui sortent de terre, Carl décide de tout plaquer en accrochant une énorme grappe de ballons à sa maison pour la faire décoler jusqu'en Amérique du Sud.


Que dire sur Là-Haut qui n'ait pas déjà été dit ? Le film a connu un grand succès notamment en festival où il a reçu de nombreuses récompenses. Dixième film des studios Pixar, c'est peut-être celui que je trouve le plus intéressant (même si je n'en ai pas vu beaucoup d'autres). En tout cas, c'est l'un des films d'animation les plus poétiques et intéressants que j'ai vu à ce jour, et laissez-moi donc vous expliquer pourquoi.


Ce qui est universellement reconnu, c'est que c'est une oeuvre mélancolique, empreinte de nostalgie et de tendresse envers le passé disparu, mais aussi pour le présent qui regorge de surprises. Qu'on soit nostalgique ou non, comment ne pas s'attacher à Carl, vieux grincheux à la fois acariâtre et ayant une étincelle d'aventure crépitant dans son coeur ? Au même titre que les sentiments du vieillard vis à vis de cette expédition évoluent, le ton du film varie, suscitant la tendresse, la tristesse, le rire et l'excitation. Car oui, une bonne aventure n'est pas seulement narrative, elle est aussi psychologique !

Toute la force de Là-Haut repose sur la construction des personnages, qui sont des êtres complexes.


Carl est un vieil homme décidé à vouloir accomplir la promesse qu'il a faite à sa défunte femme, il va devoir faire de nombreux détours avant d'atteindre son objectif. Au fil du film on réalise que sa promesse n'est pas seulement psychologique mais aussi matérielle : il tient à sa maison et à sa meuble, mais à la fin du récit, il se rend compte que pour faire un nouveau départ, les bibelots sont plus un obstacle qu'autre chose. Carl est triste car il est bloqué dans le passé, tenant à son confort dans sa bulle de frustration; originellement destiné à aller en maison de retraite, il prend le destin par les rênes, allant jusqu'à accomplir des efforts qui semblaient impossible en début de film.

Russell, d'abord boulet puis petit-fils spirituel de Carl est l'archétype d'une jeunesse que le vieil homme ne connaît pas. Alors que lorsqu'il était enfant il jouait dans un mutisme basé sur l'imagination et la débrouillardise, il se retrouve face à un petit garçon bavard et attaché à des gadgets. Cependant, le petit scout cache la véritable tristesse de sa condition : ses parents sont peu présents et personne ne semble lui prêter attention.

Très différents, les deux protagonistes finissent par se compléter, tissant un pont à travers le gouffre des âges et unifiant deux époques qui semblent incompatibles à prime abord. Au final, les personnages se retrouvent dans une valeur qui les unit : l'aventure.


Extravagante, extraordinaire aventure ! Faire voler une maison avec des ballons peut vous paraître idiot ? Pourquoi vous arrêter à une telle barrière ? Le film n'est pas si farfelu que ça, prenant ses racines dans les récits d'aventure classiques qui font rêver les enfants et les naturalistes. Outre la fable humaine, c'est un beau récit qui sait prendre aux tripes, aussi bien sur terre que dans les airs, avec des scènes mémorables comme l'affrontement sur le dirigeable, ou la rencontre avec l'oiseau géant.


De manière générale, le film est une leçon absolue de mise en scène animée.

Vous vous souvenez de ce que je racontai au début, sur mon exposé sur le montage ? Et bien après avoir revu le film dans son intégralité je peux rajouter une couche sur ce que j'avais dit sur l'excellente scène d'ouverture. Le film est construit sur la répétition, que ce soit celle des plans ou des objets de manière générale. La séquence où Ellie et Carl se marient puis s'installent dans leur maison est basé sur ce principe qui marque le passage du temps jusqu'à un dénouement tragique. Les cadrages, l'éclairage et la musique font de cette séquence l'une des plus belles et efficaces du cinéma de manière générale, un véritable calendier, qui, sans voix-off ni paroles s'écoulent paisiblement devant nous.

Les bibelots que Carl gardent chez lui et rangent méticuleusement font partie de cette mise en image de l'impact du temps. Le portrait, le petit oiseau en bois, et bien sûr les deux fauteuils, sont les symboles de l'attachement à la précision et à la familiarité qu'éprouve chaque être humain. Le décor qui nous entoure semble être une véritable part de nous-même. Que serait notre vie sans le téléviseur, la lampe et le bureau qui sont placés là depuis des années ? Voire même notre routine ! Et il en va de même pour le Livre d'aventure, les ballons qui tiennent la maison ou encore les badges de scout. Certains pour les qualifier de "McGuffin", de "Fusil de Tchekhov" ou je ne sais quel nom précis. Moi, j'aime les appeler, "artefacts de temps" car ils cristalisent le temps et l'évenèment, comme un souvenir qu'on pourrait exposer dans une vitrine, et se rappeler de tout ce qu'on a vécu avec, en le contemplant des années plus tard.


Là-Haut peut-être un formidable sujet d'études, que ce soit en terme de réalisation, de psychologie ou du rapport qu'on entretient avec les rêves, l'aventure et le temps qui passe. Mais je vais laisser ça à des gens plus compétents que moi, car j'ai dejà l'impression de parler pour ne rien dire !

En somme, c'est un film que je vous invite à revoir, peu importe que vous l'ayez déjà vu ou non. C'est même à revoir OBLIGATOIREMENT, comme une piqûre de rappel pour se souvenir de pas se laisser abattre et de prendre le gouvernail de l'existence quoi qu'il arrive, et de profiter de la beauté des merveilles de la nature. C'est aussi l'histoire d'une promesse, et de garder la foi en ce qui nous tient à coeur. Et c'est aussi un moyen de se rappeler que les ballons sont quelque chose d'à la fois étrange, factice, et plein d'espoir ! Et croyez-moi, en ballons, j'y connais quelque chose.

Arthur-Dunwich
8
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le 2 oct. 2024

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