Les mystères des exploits alpins m'ont toujours fasciné. La performance de grimper en haut des sommets les plus complexes à atteindre, la décision folle de partir à 21 et 25 piges tracer une voie pour être les premiers à accomplir une telle épopée, sont des exemples universels des rêves qu'il est possible de réaliser, avec suffisamment de préparation et d'entraînement. Et malgré leur jeunesse, il est d'abord inutile de nier l'expérience redoutable de Joe Simpson et Simon Yates. Leur façon de concevoir la grimpe, d'utiliser leur matériel et de connaître chaque astuce que ce dernier peut leur offrir, est impressionnant d'expertise, de justesse et de maturité. Et dieu sait qu'elles leur ont donné raison, car les deux hommes ont bel et bien réussi leur pari.
Le récit de ce drame, vécu au plus près, est à la fois terrifiant, digne d'un film d'aventure, mais également de haute portée philosophique. Le jeu des acteurs et la reconstitution des événements est limpide, claire et efficace. Le film échappe heureusement aux écueils malheureux des documentaires bons marchés, nous offrant une vraie vision de ce qui a pu se passer et manquer de conduire les deux hommes à la mort. Joe émeut plus particulièrement, de par son tête à tête avec la faucheuse et les moments terrifiants qu'il a dû avoir à affronter (je défie quiconque de ne pas devenir fou une fois coincé dans une crevasse de 25 mètres au moins, ou suspendu dans le vide sans aucun moyen d'y changer quoi que ce soit) et de la détermination remarquable qui fut la sienne pour lui permettre de survivre et de revenir au camp, en dépit de sa jambe cassée. Quant à Simon, injustement condamné par la corporation alpiniste, il n'a pas eu une tâche plus aisée, et on peut sans nul doute deviner la blessure qui doit encore suppurer pour celui qui a longtemps cru avoir tué son partenaire d'escalade en coupant la corde.
Démesurément long et court à la fois, cet épisode relaté avec une simplicité et une humilité qui font du bien, confirment une fois encore la fragilité de l'humain face à la nature (et aux Andes, particulièrement meurtrières). Plus qu'un survival en docufiction, c'est une histoire d'amitié, de ténacité et de courage, mais également une leçon de vie dont nous devrions nous inspirer plus souvent.