La base est minimaliste, l’impact dramatique démesuré. Le Train sifflera trois fois sonne le glas d’une manière de regarder le western ici dépoussiéré de ses poncifs et idéaux de grandeur américaine pour laisser place à une peinture de l’individualisme communautaire où chacun délaisse la figure mythique, le Père symbolique qui jusqu’alors les protégea. C’est par son brouillage entre passé et présent, laissant les compagnes d’antan et l’ennemi intime abreuver un présent déserté par les valeurs humaines, que le film parle le langage intemporel de l’individu face à ses démons, comme incarnations d’un passé qui ne passe pas, qui n’oublie pas et perpétue une logique de vengeance. Si la justice divine est impuissante et la justice des hommes insuffisante, il faut au shérif jeter l’étoile et se faire justicier. Il est sauvé par son épouse qui, en tuant l’une des crapules, le rattache in extremis à une sphère d’appartenance sans laquelle il aurait, à coup sûr, perdu la vie. Preuve que le film ne s’attache guère à peindre les vertus de la justice individuelle mais, au contraire, à mettre en scène la justice comme un pouvoir partagé à destination d’un collectif. Chef d'oeuvre.