C'est toujours avec le sourire que je revois ce film que j'ai découvert à la télé, il y a longtemps mais à l'âge adulte (jeune adulte). Oserai-je dire que ce film m'a permis de découvrir ce mode de transaction immobilière dont j'avais juste entendu parler sans en connaître les modalités. Je me souviens qu'à l'époque j'avais trouvé ça d'un cynisme incroyable jusqu'à ce que je me rende compte qu'en réalité des gens d'un côté ou de l'autre pouvaient en trouver avantage.

Le principe reste quand même une sorte de spéculation organisée sur la mort. Par rapport à la situation habituelle où les héritiers attendent (patiemment ou non) que celui qui a en main le patrimoine casse sa pipe…

Le film est une tranche de vie de quarante ans entre 1930 et 1970 de la famille Galipeau qui a acheté en viager la maison à Saint-Tropez de Monsieur Martinet, "détecté" par son toubib comme sans famille et, surtout, en mauvaise santé à l'âge de soixante ans. Le coup sûr pour un viager. Déjouant tous les pronostics hasardeux du docteur Galipeau, Martinet non seulement survit mais profitant de sa retraite entretient une forme olympique. Il est de ceux dont on dit "il nous enterrera tous" au grand dam de la famille Galipeau.

Ce qui est génial dans le scénario et dans la mise en scène, c'est que le thème, dramatique sur le fond, est traité dans la bonne humeur. On rit de la déconfiture des Galipeau et on s'amuse du cabotinage (léger) de Martinet.

De même, le lent passage des quarante années est adossé sur l'Histoire du pays, ponctuée par les pronostics foireux du docteur Galipeau et illustrée par des documents de l'époque comme par exemple les actualités au cinéma où chaque année, ressortent les habituels marronniers (Noël, 1er mai, etc …)

Mais le film fourmille de mille petits détails soutenus par une distribution faisant apparaître de très nombreux acteurs de l'époque. D'ailleurs, c'est un vrai plaisir de reconnaître au détour de la pellicule tel acteur qui vient dire un mot ou passer quelques secondes dans le film.

Celui qui tire vraiment son épingle du jeu c'est indéniablement Michel Serrault dans le rôle de Martinet bien sûr mais pas seulement car, pendant la guerre, il endosse des rôles quasi muets mais truculents d'allemand infiltré dans l'Etat-major français, dans un groupe de bonnes sœurs, … Même son cabotinage passe car il est en opposition avec l'air toujours renfrogné des Galipeau. Il passe d'ailleurs d'autant que la relation Martinet-Galipeau est contradictoire. Martinet est persuadé de l'amitié sincère des Galipeau alors que ces derniers sont suspendus au souffle de Martinet et remplis de haine à son encontre.

Michel Galabru est immense ici dans son rôle de docteur au diagnostic douteux et son rôle d'oracle foireux en matière de politique et d'économie.

Mais c'est l'air pincé et sarcastique d'Odette Laure dans le rôle de l'épouse du docteur qui emporte mes suffrages.

Je ne vais pas passer toute la distribution mais, juste pour le fun, disons que Jean Carmet, Claude Brasseur, Yves Robert, Jean-Pierre Darras, Noël Roquevert (dans son dernier rôle) sont excellents.

Au-delà de l'histoire proprement dite du viager, j'ai beaucoup apprécié que Pierre Tchernia et le scénariste René Goscinny croquent avec beaucoup d'humour et sans méchanceté les petits travers de nos compatriotes au cours de ces quarante années …

Pour finir sur le sujet du viager, je ne résiste pas au plaisir de citer la réplique "On devrait vendre la France en viager aux allemands"

Faites-moi confiance !


JeanG55
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