Le Voyage de Chihiro, huitième film du réalisateur Hayao Miyazaki, sort dans les salles nippones en 2001, quatre ans après son précédent film, Princesse Mononoké. Succès absolu, le film attirera 23 millions de spectateurs dans les salles de l'archipel (contre 13 millions pour Princesse Mononoké) et deviendra le plus gros succès du box office japonais (place qu'il occupe toujours aujourd'hui). A l'international, le film remportera l'Oscar du Meilleur Film d'Animation et l'Ours d'Or au Festival de Berlin.
Alors qu'ils se rendent vers leur nouvelle maison, Chihiro et ses parents entrent dans le monde des esprits. Suite à un événement de nature magique, la fillette, se retrouvant seule, va devoir trouver un moyen de sauver sa famille et de rejoindre le monde qui est le sien.
Chihiro et Lewis Carroll :
De nombreux éléments du film de Miyazaki peuvent faire penser au conte Les Aventures d'Alice au Pays des Merveilles de Lewis Carroll.
On peut noter par exemple le tunnel qu'emprunte Chihiro pour atteindre le monde des esprits, qui rappelle le terrier du lapin blanc d'Alice au Pays des Merveilles, ou encore, la transformation des parents de Chihiro en cochons, qui peut faire penser au Chapitre VI du livre de Carroll. En effet, Alice se rendant chez la Duchesse y assiste à la transformation d'un bébé en cochon.
Dans les deux œuvres, on peut également noter une importance non négligeable de la nourriture. Dans Le Voyage de Chihiro, elle permet notamment à la jeune fille de demeurer dans le monde des esprits ou de soigner Haku et le Sans-Visage et, c'est par l'abus de nourriture que les parents de la fillette subiront leur transformation.
Les thèmes chers à Miyazaki :
Bien entendu, on retrouve dans Le Voyage de Chihiro les thèmes de prédilection de Hayao Miyazaki :
Le réalisateur aborde ici le thème du passage à l'âge adulte par un voyage initiatique. Au cours de son périple, Chihiro gagnera, notamment par le travail, en confiance et en indépendance. Elle sera également le seul personnage de sa famille à évoluer au cours du récit, ses parents semblant avoir tout oublié de leurs mésaventures.
Le film véhicule également un message écologique : L'exemple le plus évident étant bien sûr la scène au cours de laquelle Chihiro doit, aidée de Lin et du personnel des bains, nettoyer un esprit putride qui se révélera être l'esprit d'une rivière polluée. Haku, lui, est l'esprit d'une rivière qui a été remblayée et couverte d'immeubles et la simple existence de bains à l'usage des dieux et esprits montre que ceux-ci ont besoin de se reposer et d'être purifiés.
A travers le personnage du Sans-Visage, qui distribue l'or à tour de bras et qui ne peut se construire une identité qu'en absorbant les membres du personnel du bain, ainsi qu'à travers la cupidité dudit personnel, Miyazaki dénonce le culte de l'argent, la perte d'identité à laquelle il peut conduire et souligne le caractère illusoire du pouvoir qu'il procure (l'or qui se change en poussière, Chihiro qui ne cédera jamais aux avances du Sans-Visage).
Le huitième film de Hayao Miyazaki est un film extrêmement riche, non seulement du fait de la qualité de son animation mais aussi de la richesse de ses personnages et des thèmes qu'il aborde.