Millennium Actress c’est le deuxième film de Satoshi Kon, ce grand monsieur que vous connaissez peut-être pour Paprika ou encore Perfect Blue.
Dans ce film, il nous fait suivre deux journalistes allant trouver Chiyoko, une vieille femme recluse. Celle-ci était l’une des plus grandes actrices de son époque et a marqué l’industrie de son temps de son empreinte. Les deux bonhommes vont donc interviewer cette femme de légende, l’amenant ainsi à se replonger dans ses souvenirs. Cette rétrospective commence dès l’enfance et se poursuivra à chacun des moments clés de sa vie. Chaque séquence raconte un morceau de la vie de Chiyoko à travers des scènes de films qu’elle a joué, mêlant habilement l’autobiographie, la fiction et les rêves de Chiyoko. Cela permet aussi au film de varier les ambiances passant tantôt d’un film de samurai à celui d’un film de guerre, chaque chute ou accroc permettant des transitions aussi brusques que subtiles. La confusion entre le présent et le récit du souvenir est accentuée par la présence des deux journalistes pendant toutes les différentes séquences, soutenant un relief comique efficace. Si au début ce type de narration peut désarçonner, on lâche rapidement prise au gré de l’action et l’enchaînement des scènes d’une fluidité impressionnante.
Millennium Actress ce n’est pas juste un film rudement bien ficelé, c’est aussi une histoire, très simple : celle d’une femme qui n’a jamais oublié son amour d’enfance et qui durant toute sa vie continuera à le chercher. Et cette thématique centrale, simple mais pas simpliste, va être traitée par Kon avec douceur et subtilité comme toutes celles que l’on peut entrevoir à travers le film (une partie de l’histoire du Japon, l’Alzheimer, la manière d’arriver à ses objectifs, l’innocence du rêve et son décalage à la réalité, l’ambivalence de la nature humaine…).
Durant une 1h27 minutes, Kon nous livre un film dense mais d’une fluidité rare. Il n’y a pas besoin de porter la réflexion trop loin, il n’y a pas besoin de s’interroger sur chaque plan, il suffit juste de se laisser porter par le film, de se laisser perdre par Kon et une fois fini, regardant en arrière, on se rend compte de la richesse qui nous a été proposée. Et même si une partie du film peut nous sembler impénétrable, la fin marquera tout un chacun.
Trêve de bavardages, à vous de vous forger votre propre opinion. Certains ne seront pas plus touchés que ça, d’autres diront que le film ne va nulle part, mais personne ne pourra lui reprocher un manque de travail sur la forme. A titre personnel, j’ai beaucoup aimé ce film, même si je ne le classerai pas parmi mes favoris, force est de reconnaître le tour de force opéré par Kon. Et puis on a quand même monsieur Hirasawa à la bande-son, et rien que ça, ça vaut le détour.
PS : Pour la petite anecdote, le thème de fin, Rotation (Lotus-2) a été joué lors des funérailles de Satoshi Kon : https://www.youtube.com/watch?v=8rNUPVWPquE