La production française a traduit "El bar" par "Pris au piège" ; même un chimpanzé trisomique et inculte aurait pourtant pu en faire la traduction et se serait épargné une crétinerie de traduction de plus.
Une clientèle hétéroclite et hasardeuse de bistrot se retrouve enfermée dans le bar : une bimbo sans fond exhibant ses formes, un ancien flic à peine fascisant, un VRP pervers, un clodot déglingué, la tenancière despotique et son employé compatissant, un étudiant (dé-)«connecté» et une vieille pingre.
Ils réalisent que s'ils sortent du bar un tueur leur plombe la cervelle direct,
avant de comprendre qu'ils sont dans l’épicentre d’une catastrophe virale et les victimes collatérales d’un plan de «nettoyage» gouvernemental.
Peu importe ces confusions, car l’enjeu du film est de montrer comment l'homo-sapiens médiocre lambda parviendra à réaliser l’impitoyable étau, à élaborer des stratégies de défense, tant communes qu’individuelles, à partager les insuffisantes doses de sérum dont ils disposent, et surtout à fuir par tous les moyens de ce guêpier promis à un imminent abatage d’Etat.
Effroyable et successif triple huis-clos Espagnol, fait d’alliances improvisées et révélatrices des pulsions humaines, perdition qui vire à l’épouvante, à la psychopathie et au survival, en prenant clairement parti pour l’humour méchant, excessif, et bien plus réaliste qu'on ne le suppose.
Les enjeux de l’horreur se subordonnent à l'humanité intime des victimes, avec ce qu’elle suppose de pourriture, d'égoïsme, de prédation, d'instinct crasse de survie, mais aussi, plus rarement, de beauté et noblesse.
Cette formidable farce tragi-comique est révélatrice de situations, de portraits et de comportements, à tous niveaux, des atouts et des abominations de nos frères homo-sapiens, magistralement déployée en mode horrifico-burlesque, dans un fable moderne plus philosophique qu'on ne s'y attend.