Takashi Shimizu est sans doute le plus doué, techniquement parlant, des réalisateurs apparentés à la J-Horror. Dans ce "Rinne", il atteint un degré de cohérence formelle auquel ne nous avait pas habitué sa franchise "Ju-On", collection de vignettes horrifiques beaucoup plus déstructurée. On retrouve cependant son goût pour les yûrei extrêmement agressifs et pour les dispositifs spatio-temporels complexes.
Le titre désigne en japonais l’idée bouddhique d’une transmigration des âmes et/ou le cycle sans fin des morts et des réincarnations. [spoiler alert!]
Des dizaines de victimes d’un abominable massacre perpétré dans un hôtel par un chirurgien devenu fou, devenus des spectres vengeurs, décident, des années plus tard, de recréer littéralement la « mise en scène » de leur mort – métaphore cinématographique suggérée par le fait, macabre, que leur assassin avait filmé l’intégralité de son massacre à l’aide d’une caméra portative. Au même moment, un réalisateur décide d’adapter le récit de ce massacre au cinéma et fait construire, pour cela, une réplique de l’hôtel en studio. À partir de là, le récit tend à faire converger et à brouiller les frontières de trois espaces-temps distincts, correspondant chacun à un film : celui du massacre original ; son adaptation filmique en cours de tournage dans l’hôtel recréé en studio ; la re-création, des années plus tard, du massacre par les spectres des victimes dans l’hôtel originel, désormais abandonné, sujet du film de Takashi Shimizu lui-même. Prisonnière de cet inextricable enchevêtrement spatio-temporel, l’héroïne du film, une des figurantes de l’adaptation cinématographique en projet, y perdra finalement la raison.