À Londres, Adam vit dans une tour où la plupart des appartements sont inoccupés. Une nuit, la monotonie de son quotidien est interrompue par sa rencontre avec un mystérieux voisin, Harry.

Et je pense qu'il ne faut surtout pas en dévoiler plus. Sans Jamais Nous Connaître est un film énigmatique, un cheminement mental qui doit être exploré sans aucune connaissance préalable. C'est une œuvre complexe, qui s'amuse à nous perdre dans sa première partie, avec un propos déstructuré et mystérieux. Le film repose de plus sur un procédé de narration assez déconcertant, qui cueille véritablement le spectateur à froid. Et qu'il serait bien dommage de révéler.

C'est pour cette raison que cette critique s'attardera principalement sur la forme, et non sur le fond. Les thèmes principaux abordés ne seront ainsi pas dévoilés, même s'ils abritent tout l'intérêt et la puissance émotionnelle de l'œuvre. Un exercice pas super simple en résumé, vous en conviendrez.

Bon, en tout cas on peut commencer par dire que c'est vachement beau. Et ce dès le premier plan du film, sorte de fondu d'un personnage dans une fenêtre face à un lever de soleil. La photographie est absolument splendide, donnant ces teintes violacées et chaudes aux nuits que traversent les personnages.

La tour vertigineuse dans laquelle vivent Adam et Harry est par ailleurs entièrement bordée d'immenses baies vitrées. Ce dispositif offre régulièrement, en arrière-plan des scènes, une vue imprenable et quasi-panoramique sur la ville. Et chaque cadre devient alors prétexte à un plan mémorable.

En journée, la photographie, les effets de flou ainsi que les éclairages utilisés confèrent une dimension spectrale au long-métrage. De même, la présence constante de miroirs et fenêtres dans le cadre remplit chaque scène d'une multitude de reflets, soulignant l'aspect des protagonistes.

Ces visuels vaporeux appuient parfaitement le propos du récit, faisant ressentir viscéralement au spectateur l'évolution spirituelle des personnages. Le film devient alors une véritable expérience sensorielle, qui nous demande un certain lâcher-prise afin d'accéder pleinement à son discours.

Ces sensations troubles sont également renforcées par un travail brillant de mise en scène. Le cinéaste s'amuse à laisser en permanence dans son cadre des zones floues et/ou cachées, afin de constamment solliciter notre imaginaire. Ces cases manquantes sont à l'écran pour que le spectateur les comble, en projetant dans le récit ses propres tourments.

La caméra et le regard du réalisateur sont toujours disposés au millimètre près, notamment lors de séquences érotiques, mêlant tension sexuelle et pudeur de manière assez remarquable. Cette intimité dans le récit se traduit par un casting extrêmement resserré, composé d'un quatuor parfait : Andrew Scott, Paul Mescal, Claire Foy et Jamie Bell.

Même si le film traite de deux thèmes majeurs et bien spécifiques, il surprend en réalité par son universalité. L'œuvre traite en réalité de l’amour, sous toutes ses formes. Montrant qu'il est en fin de compte le moteur de tous nos changements, de tous nos déclics face aux souffrances enfouies.

Il est alors intéressant de revenir sur la campagne de communication de Disney. Le film est sorti le jour-même de la Saint-Valentin, et a été vendu comme une romance légère. Ce qu'il n'est absolument pas. L'œuvre est un vrai gros morceau émotionnel, une profonde remise en question de notre vision face à nos entourages personnels. Il questionne un rapport très pur (et assez tabou) à l'amour, qu'il soit amoureux ou familial.

De la même manière, le film est majoritairement décrit comme un tire-larmes, ou un parcours émotionnel dévastateur. Ce qui est une autre erreur. Tous ces commentaires ont créé une attente inconsciente en moi, désamorçant sans aucun doute une légère partie de l'impact émotionnel de l'œuvre. Encore une fois, il faut prendre le récit comme un voyage, un parcours initiatique et une déconstruction intime de nos troubles personnels.

Odyssée sensorielle à la frontière de l'onirique, Sans Jamais Nous Connaître est une œuvre bouleversante, nous rappelant puissamment toute la beauté du sentiment amoureux. Un récit sensible et doux-amer, qui nous hante encore bien après la fin de notre visionnage.



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le 3 mars 2024

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