Décidément Guillaume Nicloux figure peut-être comme l’un de nos réalisateurs les plus stakhanovistes depuis quelques années, avec un rythme d’un film voire plus par an (cette année il y en a donc eu deux avec « Dans la peau de Blanche Houellebecq »), mais aussi et surtout l’un de nos plus hétéroclites. Et cela, depuis le début de sa carrière avec le film qui l’a révélé : « Le Poulpe ». Il passe du polar à l’horreur, du drame à l’expérimental ou encore de la comédie au documentaire avec une aisance rare. Alors bien sûr, la qualité s’en fait parfois ressentir (au hasard, « La Tour ») mais il nous a livré aussi quelques perles comme le polar « La Clef », la comédie complètement azimutée entre fiction et réalité avec Depardieu et Houellebecq « Thalasso » et surtout l’immense et sublime drame mâtiné de fantastique « Valley of love » qui magnifiait le couple Depardieu-Huppert dans la Vallée de la mort. Et voilà que le bonhomme nous revient déjà pour un projet inattendu le concernant : un biopic en costumes sur Sarah Bernhardt! Et puis, au final, au vu de sa versatilité on se dit que plus rien ne nous étonne... Il s’en est d’ailleurs fallu de peu pour que ce film soit une totale réussite...


En effet, premier bon point concernant ce « Sarah Bernhardt, la Divine » : on est loin, très loin de la biographie proche de l’hagiographie comme il en sort plusieurs tous les ans sur les artistes musicaux ou autres (coucou « Monsieur Aznavour »). Loin aussi du film dense de plus de deux heures qui tente d’encapsuler une vie longue et pleine d’événements sur ce laps de temps qui correspond souvent mieux au format série. Nicloux n’ira pas non plus vers le côté sérieux souvent indissociable de ce genre de films. Il propose quelque chose de léger, presque frivole, qui correspond parfaitement à la personnalité délurée de cette artiste ô combien mythique. Et il prend son histoire d’amour avec le père de Sacha Guitry, Lucien, comme liant pour nous la croquer sur trois époques distinctes dans un montage pas toujours chronologique sur plus d’une trentaine d’années. Ces choix sont majoritairement à saluer mais le prix à payer de cette audace de style et de narration est qu’on a parfois l’impression d’une œuvre un peu superficielle et peut-être frustrante. Paradoxalement, on se demande si une biographie plus classique dans la veine de « La Môme », pour prendre une référence culte, n’aurait pas mieux convenu. On préfère ne pas trop y penser et se délecter de ce long-métrage qui nous présente bien cette femme, sa vie de l’époque, son caractère impétueux et sa personnalité progressiste voire avant-gardiste pour l’époque.


Il fait plaisir d’entendre ou de croiser tout le gratin artistique et littéraire de l’époque. On voit brièvement Freud. On fait la connaissance de Zola et Edmond Dantès. De Guitry aussi forcément. On entend parler de Dreyfus, d’Oscar Wilde et de Victor Hugo. Une ribambelle ou plutôt une valse de personnages qu’on n’a pas le temps d’apprécier tant ils ne font que passer. Et c’est un petit problème du film : hormis l’artiste, les autres rôles n’ont pas le temps ni la matière pour exister véritablement. Certains sont même incarnés par de grands acteurs comme Laurent Lafitte, Amira Casar ou Laurent Stocker mais ce ne sont que des ombres ou des pions destinés à servir la soupe à une Sandrine Kiberlain déchaînée. Une prestation dont on ne sait pas dire si elle est géniale ou en surchauffe mais en tout cas il y a du travail derrière et elle pétille de mille feux. On aurait aimé aussi que le film sorte un peu des intérieurs parisiens, certes impeccablement reconstitués de manière opulente, au vu du parcours international de cette femme. Manque et faute de budget probablement. En somme, c’est distrayant, parfois amusant et ces bribes de sa vie montre bien son tempérament mais tout cela manque peut-être un peu de rigueur et d’amplitude.


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JorikVesperhaven
6

Créée

le 13 nov. 2024

Critique lue 33 fois

Rémy Fiers

Écrit par

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