Shinjuku incident est le dernier film classé dans le top Jackie Chan sur SensCritique que je n’avais pas encore vu.
Les diverses affiches présentant le héros bien habillé et armé d’un flingue m’avaient fait penser que Jackie jouait un flic, mais pas du tout, il incarne Steelhead, un immigrant Chinois, qui arrive illégalement au Japon. On ne sait pas pourquoi, on ne sait pas qui il est, ni qui sont les gens qui l’entourent. Il y a pleins quelques flashbacks censés nous aiguiller, mais j’ai trouvé qu’ils ajoutaient à la confusion : les évènements présentés sont mal choisis, pas assez évocateurs pour qu’on comprenne ce qu’il se passe, et ils sont disposés un peu au hasard au fil du film.
Il m’a fallu un moment pour remettre les morceaux en place : Steelhead a quitté son pays à la recherche de sa copine, qui n’est jamais revenue de son voyage au Japon. Lui qui était agriculteur, il doit repartir de zéro en acceptant n’importe quel travail au noir, au risque de se faire arrêter.
Il découvre que son ex est désormais mariée à un chef des yakuzas, mais alors qu’on aurait pu s’attendre à ce que ça soit l’intrigue centrale, Shinjuku incident multiplie les trames, toutes mal exploitées. Dans un même temps Steelhead rencontre une autre femme, avec qui il est vraisemblablement en couple à la fin du film, même si on ne voit rien de l’évolution de leur relation.
Le héros croise aussi régulièrement la route des yakuzas depuis le début, et on se doute qu’à un moment ils vont se confronter, mais l’élément déclencheur est absurde. C’est juste parce qu’un pote de Steelhead discute avec la fille d’un criminel… et se fait voler son chariot de marrons. Comme si un seul élément déclencheur ne suffisait pas, le même personnage se fait de nouveau attaquer par les yakuzas juste après ; une séquence violente qui se veut tragique… mais ce qui est vraiment dramatique, c’est que ça en est ridicule. C’est horrible à dire, mais ça en est même risible.
Shinjuku incident semble vouloir présenter le destin des immigrés, en faisant une fresque retraçant le parcours criminel de plusieurs personnages, leur ascension et leur chute ; sauf que ça manque de cohérence et de continuité pour que ça soit efficace. Alors qu’il débutait en nettoyant les égouts et des décharges, Steelhead gravit les échelons en travaillant avec les yakuzas ; on lui demande un jour de tuer deux hommes, et il le fait, sans problèmes. Et puis ensuite il décide de mener ses affaires en toute légalité, et en traitant bien tout le monde. Le héros n’est pas consistant.
Pour les autres personnages, le scénario accélère leurs transformations ; le type le plus innocent de tous se retrouve à passer du côté obscur, ce qui nous est signalé par son changement de look. Il s’habille comme une caricature de rocker des 80’s, avec des tenues à paillettes et une perruque blonde ébouriffée. La première fois que je l’ai vu ainsi avec sa bande, j’ai sérieusement cru qu’ils revenaient d’une soirée à thème ou un truc comme ça ; ils sont ridicules, et à chaque apparition je ne pouvais pas m’empêcher de lâcher "oh putain…".
Et quand le film veut augmenter l’intensité dramatique, c’est soit chiant, comme tout ce conflit entre les différentes membres de gang, alors que les affaires des yakuzas sont ennuyeuses, soit grotesque, à l’image de l’échappée de Jackie au ralenti, car ça en fait trop.
Ironiquement, ce qui est censé être le moment le plus poignant est aussi le plus ridicule. Un personnage, pourtant mourant, se déplace on ne sait pourquoi en un lieu symbolique du début du film, histoire de dire au spectateur que la boucle est bouclée. Il est dans l’eau, et le type qui le retient le laisse glisser en lâchant un "oh", genre "oups". C’est un détail, mais à pleurer de rire.
La première fois que Steelhead se fait embaucher par un yakuza comme tueur, on se demande pourquoi, car il n’a fait preuve d’aucun talent de combat particulier. Et je me demande également pourquoi ils ont pris Jackie pour faire ce film, parce qu’il incarne un simple civil qui ne sait se battre, et on n’a droit à aucune de ses prouesses habituelles. De toute façon les rares combats sont trop cut et pleins de sautes d’axe ; la recette parfaite pour rendre une scène illisible.
Peut-être que la star voulait juste faire un film plus sérieux, mais je m’attendais au moins à un petit combat, une petite cascade, pour relever le niveau. Sans Jackie, je n’aurais jamais regardé ce film, et ça n’aurait pas été plus mal. Quel ennui !