The Dark Angel
Tim Burton avec Michael Keaton, Christopher Nolan avec Christian Bale, Zack Snyder avec Ben Affleck. Batman est un des super-héros qui cumule le plus de nouvelles adaptations jonglant entre des...
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le 2 mars 2022
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Ce film Batman était très attendu. La première photo de Robert Pattinson pourtant le costume date d'il y a peut-être 2 ans - voir plus. L'épidémie est passée par là et a compliqué les choses. Tant d'attente...
La promo de ce film démontre que ce super-héros au cœur sombre a quelque chose que peu d'autres peuvent se targuer d'avoir... plus qu'une fanbase, une aura qui s'étend au-delà de la pop culture. Depuis quelques années, il pleut littéralement des super-héros sur nos écrans ; ils ont envahi jusqu'à l'univers des séries. Le projet The Batman aurait pu se noyer au beau milieu d'un océan d'actualités super-héroïques parfois épuisant, aussi vaste qu'actif : "encore un film de super-héros ?", "encore un Batman ?", "encore un nouvel acteur pour interpréter Batman ?"... mais le public a répondu présent - sans qu'on ait pour autant besoin de l'attirer en faisant revenir Christiane Bale ou Ben Affleck (c'est de toi que je parle No Way Home). Le film nous le rend bien et nous respecte entant que spectateur - nous prend pas pour des idiots, ose, ne tend pas vers la facilité...
Ce film était-il trop attendu ? Avait-il les épaules pour porter le lourd poids généré par l'attente ? Était-il suffisamment solide pour ne pas souffrir des comparaisons avec les films Batman du passé (certains... pas tous) ? Le temps nous apportera les réponses.
Je préfère l'annoncer, par souci de transparence et pour une meilleure lecture de cette critique, à titre personnelle, deux films Batman sortent du lot, et de très loin... Begins et The Dark Knight. Bien que j'éviterai de faire des comparaisons entre ces deux films, je tenais à le souligner pour permettre de mieux comprendre (peut-être) mon point de vu.
On nous vendait un film violent - la première bande-annonce semblait nous l'annoncer avec un Pattinson débordant de haine et fracassant le crâne d'un malfrat. La violence reste suggérée : je pense notamment à une scène de torture que va subir un moment un personnage. À deux reprises, Batman va littéralement casser la gueule de deux gars sans une goutte de sang et sans montrer à l'écran le visage de la victime (... du héros). Peut-être avions-nous mal interprété les trailers. Sans rancunes.
La réalisation nous avait promis lors des premières bandes annonces un film noir digne des polars les plus poisseux. Elle y est parvenue. On voulait un Batman sombre et noir, on l'a ! Cela dit, je regrette la presque omniprésence de scènes de nuit et sous la pluie. Ca vient accentuer l'effet désiré d'un Gotham noir, sale et froid, mais n'est-ce pas aussi recourir un peu à la facilité ? Il aurait été intéressant, d'autant que ce film dure 3h, de nous faire passer par différentes ambiances pour venir contraster et accentuer d'avantage l'apparence du Gotham des faubourgs. Certains verront dans ce choix de réalisation une réussite dans l'objectif de nous oppresser, de nous asphyxier dans une ville tout sauf désirable.
Concernant la photographie, pour venir accentuer cet aspect désagréable, il a été décidé d'utiliser des focales venant modifier les bords de l'image et de créer des flous similaires à du bokeh, mais relativement différent - moins esthétiques. L'initiative et le résultat sont très intéressants !
Les décors - pour ceux qu'on arrive à distinguer dans le noir et malgré la pluie - sont absolument irréprochables.
Les costumes (et le parti pris lors de leur conception) rappellent beaucoup ceux du Dark Knight. Si la grande nouveauté des films de Nolan était de nous proposer un Batman aux portes du réalisme (en comparaison des Batman précédents la tâche n'était pas si difficile), il est certain qu'on retrouve cette même dynamique dans la conception du costume de Catwoman, dans l'apparence du pingouin, et des costumes de Batman et du Riddler. Il est écrit en commentaire d'une vidéo postée en ligne par le Riddler que le masque serait, si je me souviens bien, un masque militaire prévu pour le froid. Concernant Batman, un exemple parmi tant d'autres : il ne va pas s'envoler en agitant de grandes ailes comme celui de Burton, mais par un moyen existant réellement - bien que totalement fou.
Parlons un instant de la musique. Les thèmes sont absolument grandioses et immédiatement iconiques.
Le thème de The Batman avec son ostinato d'un noir Dark Vadorien qui laisse place à des harmonies lumineuses et pleine d'espoir... mon cœur fond. Le thème de Catwoman rappelle l'intensité dramaturgique de celle du Parain (j'ose).
Enfin un ostinato digne de ce nom dans un film de cette ampleur ! Deux notes qui se gravent en nous dès les premières minutes de film et qui ne nous lâcheront pas. Elles revêtiront des apparences différentes à certains moments, mais elles seront là, tapis dans l'ombre - comme le fait le héros. Je tiens à souligner que la manière avec laquelle Something in the Way (qui, admettons-le, nous avait tous mis parterre lors du premier trailer) a été utilisé dans le film est excellente et que les liens faits entre ce morceau est le reste de l'orchestration et des mélodies de la BO sont remarquables. Le fait que Something in the Way tangue sur seulement deux accords tout comme l'ostinato du film... rien à dire, c'est magnifique !
Si certains s'amusent à poser la question de savoir si ce film est d'ores et déjà culte, ce qui est sûr en revanche c'est que Sonata in Darkness est dès à présent rentrée dans le monde des plus grandes BO. Je dois reconnaître que le titre qui me met parterre est sa petite sœur Funeral and Far Between. Zimmer avait marqué de son empreinte l'univers du chevalier noir, Giacchino lui a emboîté le pas (la BO de Elfman est géniale, mais je retrouve plus en elle le monde de Burton que celui du justicier).
Le film repose sur une enquête. En cela il est comparé à Seven et à Zodiac. Seulement, ici, on est avec Batman et on se retrouve tout bonnement à le suivre dans un escape game qui se déroulera de la façon la plus linéaire qui soit... C'est tellement dommage. Le super-méchant, l'homme qui impose cette enquête, est censé être l'un des hommes les plus fous et complexes de Gotham ! Pourtant, c'est Alfred qui sans difficultés apparentes est délégué pour aider Batman dans le décodage d'une lettre.
Les enquêtes sont imposées par le Riddler ; un cerveau fou, faut-il le rappeler ? Il aurait été intéressant de montrer que pour résoudre ces énigmes il fallait frôler la folie, entrer dans ce cerveau nocif. On peut lire que le Batman de ce film est sûrement le plus dérangé que l'on n'ait jamais vu... Alors pourquoi ne pas avoir axé sur cette aspect de l'enquête et cette lutte entre deux esprits dérangés - plutôt que d'en faire un simple film à enquête ? Du coup (je schématise et provoque un peu) il nous reste Batman qui résout un escape game...
Pour terminer sur ce point, et bien représenter ce qui m'agace concernant cet aspect du film :
ce qui nous semblait être un simple objet au croisement entre une petite pelle et un marteau (qui avait servi au début du film et qui réapparaît comme un cheveu sur la soupe à la fin) prend une valeur considérable grâce à un flic à côté de Batman et qui lui dit que son cousin est tapissier et que cet objet en question sert en réalité à décoller les tapisseries - alors qu'on lui a rien demandé...
Franchement... C'est comme ça que Batman résout les énigmes du Riddler ?
Tout ça me laisse l'impression d'une enquête faussement et inutilement compliquée.
Les acteurs sont bons, mais calmons-nous... On peut dire que Paul Dano est bon en Riddler qu'une fois le masque tombé (soit très peu de temps à l'écran) - au point d'être dithyrambique sur sa performance ? Kravitz incarne parfaitement Catwoman, autant que Jeffrey Wright avec son Gordon, sans pour autant proposer des prestations un chouia marquantes. Quand au choix d'un Collin Farrell ultra-protésé en pingouin... curieux choix, mais ça fonctionne.
Le Batman de Pattinson est un monolithe de glace : impossible à critiquer, mais difficile à encenser (je parle du jeu d'acteur). Quand à son Bruce Wayne (avec du recul), il est assez peu marquant, mais ce n'est en rien la faute de l'acteur... et pour ceux qui trouvent que dans ce film on tient le Bruce Wayne et le Batman les plus torturés qu'on ait jamais eus, repassez-vous les scènes dans Batman Begins lors desquelles Bruce a le projet de tuer l'assassin de ses parents, se fait passer devant par les hommes de Falcone et finit par jeter le flingue dans le fleuve - comprenant ainsi la différence entre justice et bourreau. Et c'est une scène parmi d'autres. Ce qui m'amène au point qui fâche...
Ce film me laisse un goût amer et ce goût tient en trois éléments : The Penguin (série prévue pour 2023), Gotham P.D (série aussi prévue pour 2023) et Catwoman (encore au stade de projet). J'ai comme l'impression que The Batman est loin d'être aussi solide qu'on le prétend, mais qu'au contraire il sert les intérêts de DC/HBO qui viennent allègrement rentabiliser/capitaliser sur son dos. Quand on voit le film et l'intérêt qu'il porte à Gordon, au Pingouin et surtout à Catwoman et qu'en parallèle on considère les projets à venir... on comprend qu'il leur sert complètement de tremplin.
Il me semble qu'il s'agit ici de la raison principale du manque de rythme dans ce film : les tensions montent sans rarement aboutir puisqu'il faut s'attarder sur d'autres choses. Des longueurs et des incohérences étranges apparaissent :
pourquoi Batman a-t-il besoin des yeux de Selina Kyle pour entrer dans le club alors que plus tard il lui suffira de s'y pointer en simple Bruce Wayne pour entrer sans problème ? Pourquoi faut-il que le passage de l'énigme en espagnol traîne autant en longueur, au point que le Pingouin lui-même en vienne à se moquer de Gordon et Batman (on n'est pourtant sur deux idiots), si ce n'est pour nous montrer à nouveau le Pingouin ?
Toujours en lien avec les personnages et leur écriture, Alfred est extrêmement mis de côté. En soi, c'est pas grave : on peut très bien faire un film Batman en mettant le majordome au second plan. Ce que je trouve triste, c'est que le film nous dit que nous sommes seulement à la deuxième année d'activité du super-héros et il me semble, que le rôle d'Alfred serait alors capitale pour venir épauler notre encore jeune et maladroit héros. A contrario, Gordon devrait encore se trouver méfiant vis-à-vis de se justifier troublé et troublant et dont il ne sait rien. Là encore, le choix me paraît quelque peu curieux. Si j'étais mauvaise langue, je dirais qu'il était plus facile de nous préparer à une série sur le commissaire de Gotham plutôt que sur Alfred. Ah, et en parlant d'écriture de personnage... à quoi sert le Pingouin dans ce film ? A quel moment était-il impossible de le remplacer par quelqu'un d'autre et sans venir impacter le film ? A peu de choses près, il pouvait s'agir de n'importe quel autre haut-placé de la mafia de Gotham... mais je vais m'arrêter là - je risquerais d'être mauvaise langue.
Les scènes de tension sont rarement efficaces.
La course-poursuite du film est bien réalisée, mais tellement difficile à lire que son impact en est amoindrie. Catwoman est d'une faiblesse incroyable au combat : calmée par une prise de catch ultra-macho par Batman et en deux secondes par Falcone. Un Batman suspendu au-dessus du vide et menacé par un gars qui va littéralement prendre tout son temps, attendant que Catwoman arrive et l'empêche de tirer sur le héros (dans le genre téléphoné...). Remarque, on a eu un peu plus tot la même scène mais conçue symétriquement : Selina à deux doigts de se faire tuer par Falcone... mais Batman (qui était la seule personne avec eux dans la pièce) arrive pour la sauver.
**La scène de l'interrogatoire vient nous stimuler par une révélation puissante, mais qui finit par faire pchit, car en fait : on croyait qu'il le savait, mais finalement non...
En parlant de pchit... pourquoi, alors qu'on vient d'avoir une superbe révélation venant de Falcone sur la mort des parents de Bruce (ce qui n'est quand même pas rien), on vient presque aussitôt la désamorcer en allant voir Alfred (qui finalement ne va pas trop mal au vu de l'explosion qu'il s'est pourtant pris en pleine poire) et qui lui répond qu'en fait ce serait plutôt l'inverse... mais qu'en vrai on sait pas ? L'idée était bonne, mais retombe elle aussi comme un soufflet.
Un dernier pour la route :
L'attentat contre la digue est amené tellement vite... au point que Batman ne peut même pas agir - reste qu'il lui faut sauver le maire (on avait le choix entre sauver la ville des eaux et sauver le maire qu'on a vu deux secondes - contrairement à Gotham, ville au cœur de réalisation du film et avec laquelle on aura passé trois heures)... le scénario a opté pour la seconde option - nettement moins palpitante).
En bref, nous avons là un The Batman magnifiquement réalisé et fourmillant de bonnes idées, avec une photographie et une BO exceptionnelles, des acteurs tous bons, une interprétation de l'univers intéressante et encore jamais vue à l'écran... son écriture et les intérêts de DC et HBO viennent en revanche glisser beaucoup trop de cailloux dans les engrenages. En résulte un film très intéressant, mais loin d'être parfait, car malgré tout assez mou et peu marquant dans son ensemble.
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le 16 mars 2022
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