Sous-couvert d'arguments publicitaires balancés en grande pompe (revendication de l'héritage de la grande fresque américaine d'antan, filmage en Vistavision et entracte de rigueur,...), la montagne The Brutalist accouche finalement d'une souris. Abusivement et hâtivement comparé à des œuvres canoniques comme Le Parrain, le film de Brady Corbet ne manque certes pas d'ambitions mais affiche très vite un manque de moyens - qu'il s'agisse de budget comme de talent - qui parasite sans cesse leur aboutissement.
L'aspiration au gigantisme semble par exemple avoir été en intégralité contenue dans la bande-annonce, tant les plans de grande ampleur se comptent sur les doigts d'une main dans le résultat final. Paradoxe de choix pour un projet de cinéma qui traite d'architecture : jamais les constructions de Laszlo Toth ne prennent vie à l'écran, ni ne frappent par leur potentielle envergure démesurée.
Les séquences où Adrien Brody présente de manière lourdement didactique et verbeuse ses projets sous forme de maquettes sont ainsi plus nombreuses que leur incarnation concrète à l'image, dans une démonstration malheureuse de "tell, don't show", réduisant tout potentiel grandiose à un cours académique poussiéreux. C'est que Corbet, dans un souci flagrant d'amasser un maximum de récompenses en cette saison des cérémonies, préfère consacrer l'essentiel de son métrage au drame intimiste le plus convenu (et démonstratif) qui soit.
Le parcours de son héros tombe très vite dans le misérabilisme victimaire, et rien ne lui sera épargné dans une tendance douteuse au dolorisme. L'écriture se révèle grossièrement manichéenne et réduit les conflits de son intrigue à un pauvre hère manipulé et malmené d'un bout à l'autre par l'ogre capitaliste américain - tous ses représentants dans le film étant dépeints comme de vils démons chez qui ne subsiste plus la moindre étincelle d'humanité.
The Brutalist s'impose in fine comme une œuvre dont les prétentions ne peuvent masquer une évidente pauvreté de traitement, rendant assez inexplicable la hype dont elle a bénéficié auprès de la critique spécialisée. Si ressusciter un cinéma disparu est une chose et une initiative qu'il convient de louer et d'encourager, le faire de manière qualitative en est une autre.