Le film commence par la peinture fantasmée d'une vie simple à la campagne : un patriarche, son épouse atteinte de la maladie d'Alzheimer, son fils plutôt benêt et l'épouse du fils, qui semble avoir la tête sur les épaules. Jusqu'ici tout va bien, semble nous dire Sono Sion... sinon que cette famille d'agriculteurs vit non loin d'une centrale nucléaire. La catastrophe de Fukushima a déjà eu lieu. Nous sommes à Nagashima.

Ce qu'on attend se produit : tremblement de terre, tsunami, explosion de la centrale. Un périmètre de sécurité est tracé, une ligne matérialisée en plein milieu du village, l'absurdité de la situation l'emporte sur son côté dramatique. Le sous-texte de The land of hope est "comment vivre avec la radiation". Davantage qu'un film de révolte, c'est un film de résignation, comme un renoncement. Mais en cela est-il également un film sur la vie et l'amour, sur l'essentiel.

Le cœur du récit dépeint la relation profonde qui lie le vieil homme et son épouse. Sa lucidité à lui se heurte sans cesse au monde dans lequel elle évolue. Il doit composer avec. Il doit la rassurer. Il doit sans cesse lui prouver qu'il l'aime. Le couple nous offre les scènes les plus bouleversantes du film, les plus simples, les plus profondes. On retiendra surtout l'épisode de l'escapade sous la neige. Portée par la musique de Mahler, cette séquence est magnifique.

Si la narration n'est pas chorale, Sono Sion s'intéresse également à deux autres couples. Si le jeune couple de voisins est plutôt sacrifié, on s'attarde davantage sur celui formé par le fils et sa femme enceinte. Obsédée par la peur des radiations, celle-ci va l'entraîner dans une sorte de fuite en avant aussi absurde que stérile. Dommage que le traitement soit trop caricatural, le personnage du fils étant bien souvent très agaçant.

La mise en scène de Sono Sion est superbe. Épaulant un cadre toujours précis, la bande son regorge de trouvailles judicieuses et signifiantes. On notera également la formidable interprétation du couple de parents. L'un comme l'autre se montrent justes et bouleversants. On regrettera donc que le film se perde dans des intrigues annexes et pas assez solides, tant ces deux-là auraient suffit à remplir tout l'écran.
pierreAfeu
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le 1 mai 2013

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pierreAfeu

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