(ultra) Light my fire
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The Lighthouse a de nombreuses qualités.
La première étant son esthétique indéniablement originale et frappante : sa photographie noire et blanche, son cadre 1:1, sa réalisation imaginative et exhaustive (travelling ascensionnel, plongée et contre-plongée, ...), les effets sonores efficaces.
La seconde étant le jeu des deux acteurs, en chute libre dans une spirale d'auto-destruction dans laquelle ils s'entraînent mutuellement dans ce huis-clos horrifique.
Mais ces deux qualités ne suffisent pas à constituer le substrat cinématographique d'un film d'horreur qui se prétend justement d'une autre envergure.
La première moitié du film passe bien et installe un cadre angoissant et claustrophobe qui met bien le spectateur dans le bain, qui est alors prêt à découvrir les racines de cette folie pernicieuse qui s'empare du personnage principal joué par Robert Pattinson. Dommage pour lui : la deuxième moitié du film n'apporte aucune réponse et agite au contraire d'autres pompons de manège -vous savez, ces housses de laine qu'on doit attraper pour gagner un tour gratuit - qui nous amène à nous perdre dans des méandres de confusion et de folie qui ne semblent finalement n'avoir ni queue ni tête.
Car si l'on soupçonne à un moment que The Lighthouse pourrait emprunter le twist narratif de la schizophrénie du thriller psychologique type Fight Club ou Shutter Island, comme les similitudes troublantes de caractères entre le vieux gardien de phare expérimenté et son jeune assistant néophyte pouvaient le suggérer, notamment lors de la scène où
dans ses rêves, Robert Pattinson alias Ehraim Winslow AKA Thomas Howard, grimpe finalement sur la plateforme au sommet du phare, malgré l'interdiction formelle du vieux gardien qui considère que de s'occuper de la lentille de Fresnel est sa prérogative exclusive. Il y découvre un corps allongé, relève celui-ci par l'épaule et... se retrouve face à face avec lui-même. Mais pour quelques instants seulement, car il est alors lui-même saisi par l'épaule et il se retrouve alors nez-à-nez avec le vieux gardien du phare, nu, qui le tétanise alors d'un flux de lumière directement émis par les yeux de ce dernier.
Y'a-t-il une interprétation à tirer de cette scène ? Cette question se pose en fait à propos du film entier. Assiste-on, médusé puis de plus en plus blasé par la surenchère horrifique confusionniste, à plus qu'une descente aux enfers, aux confins de la folie d'un homme coincé sur une île inhospitalière et coupé du monde ? Ou ces pistes d'explication ne sont-elles que des faux-semblant, des diversions pour égarer le spectateur et lui faire oublier qu'il regarde un film d'horreur et l'empêcher de se rendre compte qu'il n'a pas vraiment peur ?
Robert Eggers nous déçoit sans rédemption possible lorsqu'il amène finalement Robert Pattinson dans les dernières minutes du film à ouvrir la lentille de Fresnel, nous faisant miroiter une clé d'explication qui éclairerait au moins quelques éléments, pourquoi la lumière du phare exerce-t-elle un tel pouvoir d'attraction sur l'âme humaine... mais non, il fait
juste mourir son personnage après quelques secondes où le héros semble s'électrocuter/ se brûler au contact de la lumière
et ainsi, nous a baladé anarchiquement pendant près de deux heures dans un cauchemar digne de Dante - avec ses créatures fantastiques, sirènes lubriques et démoniaques, tritons- certes mise en scène de manière luxueuse et extravagante.
Mais si la balade était agréable, elle nous laisse sur notre faim.
Créée
le 22 déc. 2019
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