Si j'aime bien avoir un bain d'hémoglobyne dans la rétine de temps en temps, j'ai pourtant peu d'expérience dans le body horror pur jus. The Substance est arrivé comme un éclair dans la nuit, annoncé comme la nouvelle perle du cinéma d'horreur...signée de la main d'une française en plus !


On y suit l'histoire de Elizabeth Sparkle, ancienne actrice ayant perdu sa popularité d'antan. Un beau jour, elle reçoit une publicité pour la Substance, un produit miracle qui créer un individu amélioré à partir des cellules du consommateur. Elle croit d'abord que sa vie a retrouvé un sens, mais il s'avère rapidement qu'avoir une double-identité est un chose compliqué, surtout quand les deux versions d'elle se haïssent.


Je ne suis pas grand spécialiste du cinéma d'horreur français mais celui-ci m'a...plu ! Une excellente surprise qui n'a pas usurpé sa renommée explosive !


Mais ce qu'il faut reconnaître tout de suite, c'est que l'oeuvre de Coralie Fargeat emprunte BEAUCOUP aux maîtres du cinéma fantastique.

Vous savez, j'ai souvent réfléchi à cet espèce de fantasme qui est : "Quel serait le film parfait ?" en s'inspirant de la patte de plusieurs cinéastes. Eh bien si vous aimez David Cronenberg, Stanley Kubrick, Terry Gilliam, et David Lynch, alors The Substance risque de vous faire bander, et pas qu'un peu.

Entre les décors tout droit sortis de Shining et de 2001, les maquillages charnels et monstrueux, la Los Angeles de Lynch, les plans en fisheye qui sont des miroirs de plans de Brazil, et des tas d'autres échos à des classiques du cinéma de genre, il est facile de trouver des similitudes avec des oeuvres unanimenent connues des spectateurs. Pour moi ces choix ne sont pas du plagiat facile, car le film parvient à trouver sa propre identité; en puisant dans le meilleur du cinéma de genre, il y ajoute une réflexion contemporaine et un point de vue de cinéphile plutôt qu'un point de vue de théoricien.


Le thème de l'alter ego est récurrent dans les films fantastiques, et quoi de mieux que du gore qui divise la peau et la chair pour traiter de ce sujet ? Des centaines d'oeuvres traitent du dédoublement de la personnalité, et The Substance nous renvoie à une question essentielle de la quête d'identité : comment fuir la réalité quand on se déteste ? Mais il n'est pas question de jouer sur les métaphores ou sur les hallucinations ici, LA VIANDE EST RÉELLE (citation à sortir hors contexte). Si au début l'histoire s'avère "crédible", elle finit dans un cauchemar grand-guignolesque qui fait autant sourire que vomir. La grande réussite de ce film c'est qu'il joint les deux bouts entre le body horror artistique et psychologique et le gore idiot et jouissif !


C'est amusant que le film ait reçu le prix du scénario à Cannes car je ne le trouve pas si exceptionnel que ça. Le concept est simple, c'est comment les évènements se déroulent et la manière dont ils sont mis en scène qui est vraiment intéressante. Passé un certain moment on sait comment cette fable va se terminer, mais on ne sait pas comment, et on est jamais au bout de nos surprises !


Concernant le propos, j'ai trouvé agréable de ne pas me faire écraser par du féminisme avec des gros sabots. J'ai vu des films avec une idéologie féministe beaucoup plus directe et virulente, alors qu'ici elle se limite à la réflexion sur la femme en tant qu'objet de désir. Bien plus qu'un female gaze, Fargeat offre un propos universel sur l'acceptation des autres, l'hypocrisie d'un système axé sur la beauté physique et des divertissements naïfs. Plus le film avance et plus le ton vire du malaise au cynisme, jusqu'à atteindre un degré d'absurdité grinçant qui renvoie pourtant à une vision réaliste de notre société de consommation obsédé par l'image de soi.


The Substance est probablement la grosse claque horrifique de l'année et marquera les spectateurs pendant de nombreuses années. Ravivant la flamme relayée par les grands réalisateurs fous de l'histoire du cinéma de genre, il force une fois de plus le spectateur à y réfléchir à deux fois quand il se regarde dans un miroir, ou sur le corps d'un autre être humain. C'est aussi une oeuvre folle, qui balaie les autres productions horrifiques contemporaines à grand coup de nécroses et de seins charnus.

J'espère cependant que personne ne souffrira de stress post-traumatique à la vue de crèmes anti-rides et autres produits de beauté après le visionnage !

Créée

le 10 nov. 2024

Critique lue 5 fois

2 j'aime

Arthur Dunwich

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