1968 fut l'année des westerns à l'italienne de prestige... Déjà pour la fresque existentielle et émotionnelle retentissante que constitue le Il était une fois dans l'Ouest de Sergio Leone, chef d'oeuvre incontestable et incontesté du genre sublimé par la célèbre composition opératique de Ennio Morricone ; aussi pour Le Grand Silence de Corbucci, western hivernal habité par un Jean-Louis Trintignant imperturbablement taiseux puis d'un Klaus Kinski moralement méphitique, également magnifié par le thème musical du célèbre chef d'orchestre ; enfin pour les trois westerns réalisés par l'outsider édifiant nommé Enzo Castellari en seulement quelques mois, et principalement l'excellent Ammazzali Tutti e Torna Solo dont il est question en ces quelques lignes de bref éloge critique : un authentique morceau de cinéma prodigue et resplendissant de style et de maîtrise, faux spaghetti et véritable film d'action développée sous toutes ses coutures (combats à mains nues, à l'arme blanche, fusillades, explosions, j'en passe et des meilleurs...).
Prenant comme tête d'affiche un Chuck Connors flanqué de six partenaires précisément racés par le cinéaste Ammazzali Tutti e Torna Solo est un petit festival de maestria formelle, dont l'argument narratif n'est en fin de compte qu'un vulgaire prétexte à accoucher d'une succession de séquences toutes plus flamboyantes les unes que les autres. Près de dix ans avant le fascinant et incontournable Keoma et son Franco Nero éminemment charismatique Castellari signe un tour de force technique sublimé par une science du cadrage, de la mise en scène et du découpage hautement relevée ; et dans ce long métrage d'excellente facture à la programmatique lisible jusque dans son intitulé le pur divertissement peut s'accomplir en toute autonomie, efficace d'un bout à l'autre d'un scénario savamment réduit à peau de chagrin par son réalisateur.
C'est jouissif, parfois cartoonesque mais jamais à cours d'inspiration visuelle et stylistique ni exempt de générosité. En aucune façon ledit métrage ne déroge à ses promesses initiales, capable de nous laisser déguster moult séquences de baston affriolantes en tous points. La présence, entre autres choses, du second couteau Frank Wolff dans l'un des rôles principaux et celle du mastodonte Hercules Cortes dans celui de l'un des mercenaires participent certainement à la dimension culte d'un film au coeur duquel tout ne semble - in fine - qu'affaire de ludisme. Excellent, rien de moins.