Le cinéma expérimental français, c'est un peu comme le deep web : on peut y trouver des choses horribles ou sans intérêt aussi bien que des bijoux rayonnants comme des étoiles. Dans cette comparaison, je placerais Vincent n'a pas d'écailles, premier long-métrage de Thomas Salvador, comme une très agréable surprise.


Le film nous raconte l'histoire d'un homme seul. J'insiste sur cette solitude car le réalisateur semble lui-même l'avoir souligné : les dialogues sont minimalistes voir totalement absents, mais sans pour autant tomber dans un silence ennuyeux et gênant du type Inconnu du Lac. Quand personne ne parle, c'est qu'il n'y a rien à dire, et le spectateur est libre d'observer ce garçon si singulier qu'est Vincent, un peu comme un zoologiste face à une bête sauvage. Car Vincent est un drôle d'oiseau (ou de poisson...). En dehors de ces super-pouvoirs, plutôt bien trouvé mais sur lequel je reviendrai, c'est un grand enfant, et les dialogues restreints m'ont semblé bien mettre en scène ce trait de caractère. On retrouve d'ailleurs la très courante association artistique entre personnage enfantin et nature, que d'une certaine manière on retrouvait aussi dans le pas enfantin du tout Inconnu du Lac. C'est finalement une adorable histoire d'amour et le travail qui ramènent Vincent parmi les humains.


Car Vincent a beau ne pas avoir d'écailles, il n'est pas pour autant humain. Enfin... c'est compliqué, et tant mieux ! La problématique des super-pouvoirs m'a ici semblé abordée de façon fine et intelligente, réaliste : Vincent est humain sans l'être vraiment, d'où sa difficulté à trouver sa place parmi des gens à qui il ne ressemble pas. C'est cette subtilité que j'aimerais voir dans les coquilles vides que nous servent régulièrement Marvel et consorts, des personnages plus proches du Vincent que du demi-dieu. Ce sous-contexte philosophique aurait cependant pu être abordé de manière plus explicite, mais on ne regarde pas ce genre de film en s'attendant à ce que toutes les explications nous tombent dans les mains !


En parlant d'explications, j'ai été particulièrement surpris par les effets spéciaux. Autant le signaler d'emblée, je suis plutôt mauvais pour juger de la qualité d'effets spéciaux, faute de connaissances techniques, mais j'ai été particulièrement étonné par ceux de Vincent n'a pas d'écailles. Ceux qui l'ont vu auront peut-être en mémoire la scène de la bétonnière, dont je n'ai pas encore deviné le trucage... On ne peut pas faire de films de super-héros sans effets spéciaux, et ceux de Vincent n'a pas d'écailles sont à l'image des dialogues : minimalistes et efficaces.


J'aurais des scrupules à mettre plus de 7 à ce film, car c'est un premier film et même si j'ai passé un bon moment à le regarder, le style reste difficile à aborder et il manque cette petite étincelle de magie qui change un simple long-métrage en chef d’œuvre. Mais malgré tout, ce petit film audacieux pourrait bien vous réconcilier avec les super-héros, ou vous servir de digestif entre deux copieux Marvels !

Pmh
7
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le 26 juil. 2015

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