Après trois films tous aussi barrés les uns que les autres, Quentin Dupieux avait commencé à nous habitué à son univers aux antipodes de tout classicisme. Mais on n'avait encore rien vu. Le génial Mr Oizo qui prend en mains et assume les différentes parties de fabrication de son film (il signe la réalisation, le scénario, le montage et la musique) n'aura une fois encore de comptes à rendre à personne.
Après Wrong voici Wrong Cops, comme si le réalisateur tenait à nous avertir que si l'on voulait voir un film de cinéma on s'était trompé d'endroit. Ce nouveau film met en scène des flics américains tous plus pourris les une que les autres : corrompus, pervers, cupides etc... Une série de scénettes pour une succession de clichés sur la police. Alors on le sent venir à des kilomètres, Wrong Cops sera un gros pamphlet sur l'ordre et le pouvoir comme on en a déjà vu mille fois. Et bien non. Wrong Cops n'est rien, ce n'est qu'un film sans substance ni relief. Quentin Dupieux a dépouillé son film de tout fond jusqu'à atteindre son idéal de ''nonfilm'' initié dans son premier court-métrage. Que nous raconte Wrong Cops ? En réalité rien du tout.
Les personnages sont trop grossiers pour être crédible une seconde. Donc les gags n'ont aucune double lecture, ce n'est que de la bêtise brute. Dans ce film on ne rit pas jaune, on rit tout court. Parce qu'il faut reconnaître à Quentin Dupieux le sens de l'absurde. Un trafic d'herbe stockée dans des rats morts, un borgne et un mourant espérant décrocher un gros contrat chez un producteur, un flic bourru qui prend en otage ses victimes pour qu'elles lui montrent leur poitrine, un Marilyn Monson adolescent devant rendre des comptes à la police de la musique qu'il écoute... Même si Wrong Cops a ce côté encéphalogramme plat, il enchaîne les scènes cultes.
Alors si on voulait voir un film, on s'est trompé d'endroit. Quentin Dupieux n'avait d'ailleurs pas l'air franchement partie pour en faire un. Il n'y a qu'à regarder la qualité de son image, souvent bâclée, parfois carrément floue. Il faut tout de même un certain talent pour arriver à porter son spectateur dans un film qui n'a ni queue ni tête, tourné à l'arraché en une dizaine de jours. Ça a le mérite d'être assumé jusqu'au bout. Wrong Cops sonne comme une parenthèse dans l’œuvre d'un cinéaste qui souhaitait faire un film sans but, juste pour le plaisir de filmer. Une manière de ne pas perdre la main alors même que l'on n'a rien à raconter.
C'est aussi le manifeste d'un auteur qui ne souhaite rentrer dans aucune case. À l'image du contre-emploi de Marylin Monson, Quentin Dupieux y exprime son angoisse de la normalité, tout comme il l'avait fait dans Wrong.
Wrong Cops est un objet non identifié à l'image dégueulasse, parfois floue sans raison, et au propos qui frise le néant absolu. Malgré tout Wrong Cops est drôlissime. Une fois de plus, avec ce film, Quentin Dupieux prône un cinéma libre et déjanté. Et on ne boudera pas notre plaisir !