La peur de l'innovation...
...ou comment faire un RPG médiocre quand on a une équipe et un budget AAA.
La recette est simple et connue de tous :
- Commencer par se documenter sur le jeu le plus proche de votre prototype et qui rassemble un maximum de joueurs/clients. Ici, la série des Elder Scroll dont le succès n'a pas échappé aux pontes d'EA et de Big Hug Games.
- Pomper honteusement quelques mécaniques bien reconnaissables histoire de faire un bel appel du pied aux fans (certains y verront de la frilosité voire de la fainéantise intellectuelle).
On peut s'inspirer de détails de l'interface comme les icônes pour les objets volés ou la présence de livres de 3 pages qui nous en apprennent plus sur l'univers. Mais pourquoi se limiter à ça quand on peut aussi pomper le système de résolution des délits (payer l'amende, pot de vin, prison, combat) ou encore le mini-jeu de crochetage (placer le crochet à 360° et valider le placement avec le levier sans briser le crochet). Contrairement aux pros du marketing, certains joueurs y verront plutôt autant de raisons de préférer un vrai Elder Scroll...
- S'inspirer d'un level design insipide typique des jeux action-aventure nextgen parce que la grande zone à explorer c'est quand même un peu dur/long à concevoir et à baliser (de manière subtile).
Non, on se contentera de donner une impression de grandeur avec une grande map 2D, mais en vrai ce ne seront que d'étroites zones de jeux contenant peu d'embranchements et ultra-balisées : impossible de tomber dans le vide (sauf aux endroits prévus, en appuyant sur la touche d'action), objets et coffres en surbrillance, ennemis pré-visibles sur la minimap.
Bref, un monde qui fera fuir ceux qui comme moi aiment explorer les grands espaces, quitte à s'y perdre ou à se jeter dans un guet-apens.
- Superposer un univers fantasy standard ISO 9001 (tiens les elfes, ça faisait longtemps :joke:). Et lui donner une touche colorée (comprendre fluo) pour se démarquer des concurrents et faire ressortir les screenshots sur les sites spécialisés. Comme on a pas le temps de créer des personnages secondaires intéressants on va relier tout ce beau monde à la toile du destin dont seul le héros pourra s'extraire. Ce sera l'occasion de générer 60.000 lignes de dialogues chiants sur la destinée et le libre arbitre.
- Pas assez de temps pour écrire les dialogues ? Mettez les mêmes pour tout le monde, histoire de donner l'illusion de richesse.
- (Facultatif) Utiliser le temps gagné sur le développement pour concevoir une mécanique de jeu originale (Bonus : meilleure protection de votre propriété intellectuelle).
Ici, le système de combat. Il se montre plutôt sympa, sans être révolutionnaire non plus, et bien servi par les animations et effets graphiques qui ajoutent un sentiment de puissance appréciable. J'ai peur pourtant que ce système de combat ne soit pas suffisant pour renouveler l'intérêt du titre sur le long terme faute à l'univers et au level design trop peu travaillés.
En bref, le jeu est correct dans l'ensemble, en dépit d'une interface très mal foutue, mais manque cruellement d'originalité. Avec tous les bons RPG récemment sortis, seuls les morts de faim croqueront dans cet univers insipide, au risque d'y laisser leur amour pour le genre.