Analyse des lieder de Franz Schubert
S'il est possible, dans le double domaine de la musique de chambre et de la symphonie, de tracer une histoire de l'évolution du style de Schubert, de noter les étapes de l'apprentissage qui mène à une exemplaire maturité, il en va tout autrement dans le domaine du lied. Des premiers lieder, à la ...
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créée il y a environ 6 ans · modifiée il y a environ 6 ansErlkönig
04 min.
Morceau de Franz Schubert
Annotation :
1815 - op.1 (D.328)
Der Erlkönig (Le Roi des aulnes en français) est une adaptation musicale du poème Der Erlkönig de J.W. von Goethe.
Le personnage de l'Erlkönig est très représenté dans la littérature allemande, décrit comme une créature maléfique qui hante les forêts et entraine les voyageurs vers la mort.
Les thèmes développés dans le poème sont typiquement romantiques : la mort, la nuit, le fantastique, la peur, la forêt. La musique s'en ressent, en tonalité de sol mineur, sérieuse, profonde et tragique. Le caractère de la musique change pour chacun des personnages représentés.
Un seul et même chanteur interprète alternativement quatre personnages différents : le narrateur, aux première et dernière strophes, l'enfant, der Erlkönig et le père de l'enfant. Pour distinguer les différents personnages, le compositeur a joué sur le mode, le registre (hauteur de la partie chantée), ainsi que la nuance de chaque partie :
- le narrateur est chanté dans le registre du baryton, en mode mineur. C'est lui qui annonce la mort de l'enfant.
- l'enfant est chanté dans le registre du ténor (notes aiguës), en mode mineur, et toujours forte, pour signifier la détresse, la souffrance et la peur. Chaque nouvelle apparition se fait un demi-ton plus haut que la précédente, ce qui en accroît la tension émotive.
- Der Erlkönig est chanté dans le registre du ténor (notes moyennes, chantées presque en voix de tête), en mode majeur, sur une mélodie douce et suave, pianissimo, en accord avec les paroles séduisantes du personnage fantastique.
- le père chante dans le registre de la basse, en mode majeur et mineur. Il représente le lien à la réalité, le secours rassurant de l'enfant.
Le piano joue un rôle important dans l'œuvre : les octaves et les accords en triolets de la main droite figurent le galop du cheval, alors que les gammes ascendantes (de six notes seulement) de la main gauche figurent le vent dans les branches. L'accompagnement prend un caractère berceur lorsque l'Erlkönig tente de séduire l'enfant.
https://www.lexilogos.com/allemand_goethe.htm (paroles traduites)
https://www.youtube.com/watch?v=ebAZ6d5Q-ek
(Ernestine Schumann-Heink / Katherine Hoffmann, 1913 & 1929)
https://www.youtube.com/watch?v=PaBNUzVSnj8
(Dietrich Fischer-Dieskau / Gerald Moore, 1958)
https://www.youtube.com/watch?v=VjZRDHvncHU
(Jessye Norman / Phillip Moll, 1984)
Gretchen am Spinnrade
03 min.
Morceau de Franz Schubert
Annotation :
1814 - op.2 (D.118)
Gretchen am Spinnrade (Marguerite au Rouet) est tiré de la première partie de la célèbre tragédie dramatique Faust publiée par Goethe en 1808. Le poème constitue à lui seul une scène toute entière, intitulée Gretchens Stube (La Chambre de Gretchen). Au début de l’ouvrage, Faust ― qui a vendu son âme en échange des jouissances du monde ― rencontre la jeune Marguerite (Gretchen) et demande à Méphistophélès (Le diable sur terre) de la lui procurer. Les deux complices élaborent alors un plan pour séduire la jeune fille et finissent par la convaincre. Après quelques journées d’étreintes amoureuses, Faust se retire laissant dans le doute Marguerite. C’est là, seule assise à son rouet, qu’elle découvre les tourments du premier amour : «Mon âme est flétrie; Adieu, mes jours de paix, et pour la vie, et pour jamais! Mon coeur, las de se plaindre, vers lui veut bondir; Ne puis-je donc l’étreindre et le tenir, et l’embrasser à mon plaisir. Dans son baiser, dût-on mourir!». Dans son arrangement, Schubert restituera de façon mémorabe toute la mélancolie amoureuse ressentie par la jeune fille. La mélodie est accompagnée au piano par une succession d’accords arpégés joués à la manière d’un ostinato, rappelant le ronflement des roues actionnées par la pédale mécanique. Ce lied deviendra célèbre pour ce fameux accompagnement imageant d’une façon très ingénieuse le son du rouet.
https://www.lacoccinelle.net/257281.html (paroles traduites)
https://www.youtube.com/watch?v=3oxbVz26gLQ
(Elisabeth Schwarzkopf / Edwyn Fischer, 1952)
https://www.youtube.com/watch?v=-Ud_Lt2kvSc
(Gundula Janowitz / Irwin Gage, 1976)
https://www.youtube.com/watch?v=KqR3nhBplp0
(Barbara Hendricks / Roland Pöntinen, 2018)
Der Tod und das Mädchen
03 min.
Morceau de Franz Schubert
Annotation :
1817 - op.7 n°3 (D.531)
Der Tod und das Mädchen (en français La Jeune Fille et la Mort) est un lied dont les paroles, en allemand, sont tirées d'un poème de Matthias Claudius.
Ce lied commence par une introduction en ré mineur ; les huit premières mesures sont en 2/2. Au piano, les deux mains jouent des accords ; la main gauche joue deux notes à la fois, la main droite trois. Cette introduction est calme (pianissimo), lente (moderato, mäßig) et a pour thème musical la mort.
La « jeune fille » entre à la huitième mesure sur une anacrouse. Cette partie [A] est plus agitée que l'introduction, Schubert y indique comme tempo un peu plus vite (etwas geschwinder) et comme nuance piano. La partie de piano, qui joue des croches en alternant la main droite et la main gauche, est syncopée. Un accord diminué sur « ich bin noch jung » donne une ambiance fantastique. À la huitième mesure de la chanson de la jeune fille, sur le mot « rühre » (« toucher »), les croches s'arrêtent et le rythme de l'introduction réapparait. Puis une demi cadence amène un silence avec un point d'orgue. Cette seconde partie dure 13 mesures.
Cette partie [B] est la chanson de la « mort ». On revient au tempo initial. La tonalité est également ré mineur, mais se termine par RÉ majeur. La mélodie devient quasiment monocorde et ne change que très peu de notes. Le rythme devient lent et monotone. La mort chante sans laisser apparaître la moindre émotion, créant un contraste saisissant avec la mélodie essoufflée et désespérée de la jeune fille.
La coda est une répétition de l'introduction si ce n'est qu'elle est plus courte d'une mesure et est en RÉ majeur.