La banquise et puis une giclée de sang. Ou plutôt un casque viking déposé sur le sol américain. Non, reprenons : un arbre généalogique en forme d’autoportrait… En réalité il est impossible de résumer La tunique de glace en une phrase ou une image. Parce que l’ambition folle de William Tanner Vollmann dépasse les catégories, refuse les étiquettes qu’on veut bien lui coller et est probablement comme l’écrit le New York Times « la plus singulière en littérature depuis William Faulkner ».

Vollmann est avant tout un explorateur, comme ses personnages. Il voyage : en Afghanistan pour son premier livre, en Somalie, en Iraq, au Cambodge pour les suivants. Pour La tunique de glace il a arpenté pendant des mois les terres glacées d’Islande ou du Groenland, suivant à la trace la route de ses héros Vikings. Avec en main le Flateyjarbók, un manuscrit de 200 pages écrit au XIVème siècle, plus quelques billets d’avion et l’envie folle de redécouvrir l’Amérique aux côtés de Freydis Eiriksdottir, Vollmann s’enferme trois ans dans sa chambre (d’où son teint plutôt blafard). Il en ressort avec le premier opus de ses Sept rêves, projet littéraire au long cours.

Ouvrez au hasard La tunique de glace (après avoir mis une écharpe) et vous serez d’abord happé par les paysages arctiques. La neige, la glace, le ciel, il y a une grâce et une pureté dans les éléments qui confine au poème en prose. On découvre la nature comme au premier jour. Puis surgissent les hommes les plus barbares de l’Histoire. La tuerie fait passer La horde sauvage pour une bleuette. Du feu et de cette glace jaillit une explosion d’une limpidité exceptionnelle face à laquelle il faut, pour le lecteur, lâcher prise.

L’imagination aux portes du surréalisme et la musicalité de l’ensemble évoquent irrésistiblement Gabriel Garcia Marquez ou Richard Wagner. Weerasethakul. Cormac Mc Carthy peut-être. Le jeu des comparatifs est pourtant vain. Vous voilà avertis : publié en 1990 et enfin traduit, on ne lit pas ce texte extrêmement riche et éminemment personnel comme n’importe quel roman de saison.
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le 12 mars 2013

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