Catalyseur de nos propres démons, Lucie Paugham aurait pu faire partie de ces personnages que l’on adore détester tant ils grattent sous le vernis bien appliqué de nos vies bien masquées. Seulement voilà, la lumière des projecteurs n’éclaire que trop bien les ficelles avec lesquelles Sophie Bassignac fait danser sa caricaturale et égocentrique marionnettiste.
Tournée vers elle-même et hermétique à toute idée qui n’est pas la sienne, l’artiste ne semble pas avoir conscience de la réalité qui l’entoure. Mais attention, c’est un mal nécessaire pour qui veut être artiste. On n’exprime ses idées par l’art que par nécessité absolue. Il serait farfelu de croire qu’en l’artiste se cache une personne tout à fait ordinaire. Non, l’artiste est un être torturé avec une vision unique du cosmos dont seules les œuvres artistiques peuvent témoigner de l’existence. Tandis que nous autres, la plèbe prolétaire de ce monde se complaît dans une vie morne, triste et visiblement dénuée de tout intérêt, l’artiste lui sait vivre intensément et sucer la moelle de la vie.
Cette vision binaire du monde artistique présente seulement des personnages archétypaux aussi immobiles qu’un décor de théâtre et qui semblent avoir été catapulté dans une vie où tous les codes leurs échappent mais dans laquelle ils ne doutent pas une seule seconde de leurs actions. Ils préfèrent s’en remettre à leur intuition, comme tout bon artiste.
D’une généralité s’enchaine une banalité parfois entrecoupée d’un coup d’éclat. Une note sonne juste et nous parle car fait écho à notre propre vie. On garde la phrase dans un coin de sa tête pour la ressortir au cours d’un dîner mondain et demander avec curiosité mal placée si quelqu’un a lu le dernier Bassignac.
Pas vous ? Vous en survivrez.